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21 février 2013 4 21 /02 /février /2013 09:42

 

Ici, un commentaire supplémentaire sur l'oeuvre de Louis Anquetin

et sur les rapports que tout créateur entretient avec les influences

diverses qui l'ont déterminé.

 

 

Anquetin1

 

 Merci pour votre remarque sur les "dettes"  auxquelles  aucun créateur ne semble en mesure d'échapper, pas plus Louis Anquetin qu'un autre. Sans doute du Berthe Morisot et combien d'autres influences dont le Peintre lui-même n'aurait guère été conscient. Créateurs ou non, nous sommes toujours habités de modèles, de parangons, d'affinités dont, souvent, nous oublions les racines. En réalité notre existence n'est qu'empilement de sensations, de perceptions, somme d'affects, élévation de minces influences intellectuelles, convergence de ressentis dont, à l'évidence, nous ne sommes pas plus affectés que par les variations du temps qui passe, qui fluctue selon les caprices météorologiques. Certains, cependant, peuvent retracer toute une sédimentation qui les a constitués, ayant patiemment archivé en leur for intérieur ce qui leur a donné du sens. Et quand bien même ils n'en seraient plus informés, le cheminement se faisant à leur insu, la force en serait-elle en quelque sorte atténuée ?  La psychanalyse serait proche qui leur dirait la persistance de l'inconscient à témoigner en sourdine.

  Dans un de ses livres, "Ecrire", Marguerite Duras disait: "Il m'a fallu vingt ans pour écrire ce que je viens de dire là."  Sans doute. Vingt ans de lecture, de notes, d'écriture. Vingt ans d'influences plus ou moins prégnantes, parfois décisives, parfois allusives, sans plus. Pour Marguerite Duras, écrire résultait d'abord de la mise en acte de son vécu mais aussi, à n'en pas douter, de ses lectures, autant de faits qui s'étaient métabolisés au cours du temps et qui aboutissaient à tel ou tel livre. Mais jamais que du Duras, pour le plus grand bonheur de ses lecteurs.

  Vingt ans d'existence surtout. Car toute création n'est que cela, du sang, de la douleur, de la joie aussi, du travail, une certaine obstination, parfois une obsession. De la vie en somme dont nous aurions bien du mal à démêler la part de réel, de symbolique, d'imaginaire, la part de nous-mêmes, la part de l'autre. Car il ne saurait y avoir de frontière bien nette qui établirait une ligne de partage des eaux, les miennes, les autres. Et ce qui est vrai de la création (le créateur est-il toujours averti des sources de ce qu'il met à jour qui, parfois, ne sont que des exhumations, des métamorphoses d'œuvres plus anciennes ?), est aussi vrai de la réception d'une peinture, d'un roman, d'un essai (quelle part de moi-même juge, évalue, se livre au jugement critique; quelle part de l'autre suis-je à même d'emprunter afin d'étayer quelque certitude face à ce qui se montre ?). Toujours situés à quelque confluence, toujours métissés alors que nous croyons penser par nous-mêmes, agir en toute autonomie, tracer notre chemin selon l'imperium de notre volonté.

  Mais, au reste, est-il si important que nous cherchions à cerner de manière si précise ce qui, aujourd'hui, nous détermine à notre insu ? Que nous ayons une vision rimbaldienne ou bien mallarméenne de la poésie est sans doute chose honorable et nous avons certes le droit d'avoir une inclination plutôt symboliste que tragique. A chacun son spleen. Souvent nous déterminons-nous par rapport à des catégories, à des modes, à des visions du monde. Mais ceci, en outre que nous ne l'assumons que temporairement, - aujourd'hui est si différent de demain - devrait nous soucier a minima. C'est bien de l'intérieur de notre propre subjectivité, en mettant le monde entre parenthèses, que surgit le sens pour nous qui n'est jamais le sens pour l'autre. Notre vision des choses - culturelle, éthique, sociétale, esthétique, etc… ne peut résulter que d'une singularité sous peine de ne pas être.

  C'est à cette seule injonction qu'a répondu notre court article sur l'œuvre de Louis Anquetin. Dire seulement ce qui nous préoccupe, ce qui fait phénomène pour nous et sera peut-être ignoré de l'autre ou bien infirmé par lui. Et tant mieux si notre proposition s'illustre sous une figure ou bien étrange ou bien non conventionnelle. Doter toute œuvre d'une vision particulière, libre, non soumise aux influences diverses  nous paraît être la meilleure façon de la doter d'une manière de pérennité. Bien évidemment cette inclination à tracer sa propre voie n'infirme en rien les lignes de force historiques, esthétiques, formelles qui traversent le champ de toute création.

 

 

 

 

 

 

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20 février 2013 3 20 /02 /février /2013 11:46

 

Anquetin1.JPG

 

 

Ici, nous chercherons moins à mettre en lumière les influences visibles de Renoir, de Toulouse-Lautrec, qu'à essayer de retrouver l'empreinte d'une époque, sinon d'un romantisme, d'une inclination de l'âme. Le thème de la fête, de la rencontre autour d'un verre est, d'emblée, posé dans une manière de nécessité dont nous ne saurions nous abstraire. Indubitablement, nous sommes présents, physiquement, parmi la triple évocation de la figure féminine. Nous osons quelque libation, déjà ivres au milieu des orbes colorés de la guinguette. Pas d'échappatoire possible. L'absinthe, nous la boirons jusqu'en son ultime goutte afin que rien ne soit soustrait à notre regard désirant, à notre soif d'immersion dans le sublime. Nous sommes habités de passion, nous vibrons, nous souffrons. Comment éviter une manière de transe alors que la grâce nous fait face, alors que la beauté est à disposition, préhensible, descendue parmi le peuple des hommes ? Nul rêve, même le plus fou, le plus éthéré, ne serait parvenu à produire de telles épiphanies.

  La belle "Veuve noire", au premier plan, nous entraîne dans sa propre volupté qu'abrite une troublante résille. Nous sommes pris dan une glu, nous sommes retenus derrière la pluie de flocons noirs. Mais quelle neige mortifère s'illustre-t-elle ainsi, quelle dramaturgie dont nous ne percevrions que les nervures superficielles ? Le regard est perdu, comme pour dire la douleur, l'inquiétude, peut-être la fièvre d'une possible rencontre. Et la "Blonde apparition" qui en est le contrepoint est-elle seulement présente en tant que figurante, qu'anonyme passagère ou bien confidente, ou bien rivale ? Teint d'argile, fragile biscuit pareil à la confondante énigme de la geisha. Nul secret ne saurait être mieux gardé qu'en cette abstraite beauté dont le masque, à lui seul, fait signe vers l'indicible. La vapeur des mousselines en témoigne, la brume des cheveux en est l'intime vibration. Et que l'arc ouvert des lèvres n'aille pas nous abuser, le langage est subliminal, pure efflorescence livrée à une esquisse surprise d'elle-même.

  Et cette carafe vide est-elle seulement présente pour nous révéler, symboliquement, le tarissement d'un langage, la dissolution des sentiments dans les mailles de l'exister ? Et la Forme noire, de dos, l'Inconnue, fait-elle partie de la même scène, joue-telle la même pièce ou bien son  apparition est-elle fermeture à ce que pourraient dire les Belles Isolées ? Le diadème épinglé aux cheveux semble assurer une certaine élégance, sinon une aristocratie, l'ample décolleté de la robe paraît une invite à de pures jouissances. Mais nous n'en saurons guère plus tant la falaise abrupte du dos est une occlusion, un renoncement à se dissoudre dans les supputations, les approximations qui, toujours, travestissent la vérité. Ainsi demeurerons-nous dans une parole à demi révélée, dans un clair-obscur dont nous ne pourrons sortir qu'à soustraire à nos yeux avides de savoir cette pure vision de ce qui, toujours, ne parle mieux que de l'intérieur d'une mutité.

 

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20 février 2013 3 20 /02 /février /2013 09:15

 

MALEVITCH

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20 février 2013 3 20 /02 /février /2013 09:12

 

DALI

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20 février 2013 3 20 /02 /février /2013 08:55

 

BACON

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