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6 décembre 2013 5 06 /12 /décembre /2013 09:05

 

  Les hommes, abandonnant leur sourde gangue d'hominidés, commençaient à se relever de leur position originelle, laquelle les maintenait dans une posture quasi végétative, inclinant leurs lourdes silhouettes en direction du sol avec lequel ils se confondaient. Mais l'évolution était en marche. De l'Australopithèque aux allures simiesques, en passant par l'Habilis, l'Erectus et le Neandertal pour arriver, enfin à l'Homo sapiens c'est tout simplement l'essence de l'humanité qui était en train de s'accomplir et, en même temps la maîtrise de ces éléments dont, en réalité, ils n'étaient que le prolongement naturel. Ces éléments qu'ils avaient longuement côtoyé sans bien en percevoir la nature, voici qu'ils les maîtrisaient, s'en servaient dans leur vie quotidienne, aussi bien pour les premiers rudiments de la toilette, s'alimenter, faire cuire les aliments, forger des outils et, bientôt, faire avancer leurs embarcations en utilisant la force du vent. Mais une pratique ancestrale de l'homme aidera à mieux comprendre la fusion des éléments en une seule entité riche de significations : il s'agit de la pratique de la poterie. En effet, cette technique rassemble en son sein, dans un même espace-temps, les quatre éléments dont la forme achevée réalise la quintessence. La terre à laquelle on rajoute de l'eau se modèle à la perfection, glaise souple, inventive, maternelle, enveloppante. L'air, ensuite en assure le durcissement. Quant au feu il parachève l'œuvre en lui conférant solidité, imperméabilité que l'émail vient renforcer de sa pellicule protectrice. Merveilleux assemblage de symboles, convergence sublime du sens -, qui dit le tout de l'homme en mode rassemblé. Que l'on songe seulement au magnifiques céladons orientaux qui, en une seule et même unité, conjuguent des millénaires de pratiques immémoriales, condensent les puissances infinies du génie humain.

 

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 Céladon Goryeo, Corée.

Source : Wikipédia.

 

 

 

 


 

 

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6 décembre 2013 5 06 /12 /décembre /2013 09:00

 

Il se souvient de ce jour précis, de « ce moment unique » comme Elle l’avait nommé, de cette lumière si pure, si longue à se mouvoir, si lente à renoncer à son emprise, accrochée aux cubes des maisons blanches, aux balcons, aux lampadaires, à la lisière de la mer.

  Ce jour est ancré en Lui : un moment de pur surgissement, une fenêtre ouverte sur l’horizon. Il se souvient de sa première cigarette, de son plaisir intense à suivre par la pensée le trajet de la fumée. Minces filets bleuâtres se diluant dans la lumière du couchant.

  De nouveau des quintes de toux, une respiration à la peine. Elle bouge un peu sur le lit, oriente son visage vers la fenêtre, vers le jour qui baisse.

Elle continue à raconter leur vie à La Salina, ses battements, ses outrances parfois, cet automne traversé d’une dernière tentation de la lumière, les reflets sur les feuilles argentées des oliviers, la douceur iodée de l’air marin.

 

  Il écoute les paroles qu’Elle profère avec ferveur, recueillement. C’est comme une incantation, un appel qui résonne le long des murs couleur de sable. La braise rougeoie au bout de la dernière cigarette. Prolonger cet instant, ne pas interrompre le voyage. Maintenant le filtre couleur de brique se consume dans une drôle de fumée âcre; grésillement de l’infime bout de cigarette jusqu’à son point de chute.

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5 décembre 2013 4 05 /12 /décembre /2013 09:05

 

Des mains positives aussi pour dire le corps, son importance, son règne incomparable parmi les ombres de l'antre primitif. Le corps en attente d'un esprit à partir duquel rayonner, d'une âme dont se doter afin de s'extirper aux tentations par trop pierreuses. Un crâne avait vite fait d'éclater sous la meute des silex. Pas encore de morale, pas encore de surface lisse, policée. Il ne fallait pas brusquer les étapes. Laisser à la pêche, à la chasse, à la cueillette le temps de trouver leur place avant que n'intervînt la réflexion, que ne se mît en place la structure vive du concept. Encore procéder à quelques réglages, à quelques ajustements, encore enfouir son groin taché de tubercules, emmêlé aux racines dans la glèbe lourde, encore se vautrer dans la soue avec ses compagnons et compagnes de fortune. La pratique d'une pure joie limoneuse.

  La terre était bien là, mais seulement comme socle primitif, sensation première avant que ne s'ouvrent d'autres significations plus rigoureuses. La terre en tant que terre. L'argile, on en couvrait les subjectiles pariétaux, on y apposait toutes sortes de signes, pointes de flèches, points, arcs, traits, rythmes de croix, diffusion d'étoiles. Terre où apparaissaient les premières couleurs, la sanguine, l'ocre, le noir, le blanc, lexique simple mais déjà pourvu de ce chromatisme primitif qui constituait un premier alphabet, un début d'explication, la mise en acte d'un cosmos se dégageant lentement du chaos initial. Puis, la terre, on lui donnait de plus en plus de présence, on l'assignait à devenir, là, dans le clair-obscur de l'abri, multitude de signes, charrues et bétail; cerfs aux bois étendus; bisons et bouquetins; félins et rhinocéros à la corne levée; licornes, chevaux et ours des cavernes; figures zoo-anthropomorphes, enfin on la conduisait à avoir un destin singulier bien loin maintenant d'une simple réalité sur laquelle poser l'empreinte de ses pieds. La terre, par la main de l'homme, avait été portée à la dignité de ce qui indiquait une direction, un progrès à atteindre, une vie dont il fallait témoigner. Il fallait poser les premières pierres d'un édifice de l'art. Bond prodigieux qui inscrivait l'homme, sa relation aux éléments dans une aventure ample, en même temps que se dessinaient les linéaments d'une histoire, au sens d'une fiction, d'un langage symbolique, mais aussi jetait les bases de l'Histoire en train de procéder à sa propre libération des pesanteurs préhistoriques.

 

 

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5 décembre 2013 4 05 /12 /décembre /2013 09:00

 

  Elle lui dit le séjour à La Salina, les roches noires gonflées de soleil, la colline couverte de chênes-lièges et d’oliviers, les terrasses de schiste en surplomb, la blancheur du village en contrebas, la mer avec ses criques vertes, bleues, grises parfois, si variables selon l’incidence de la lumière, le degré d’avancement du jour. Elle Lui dit l’essaim des îles volcaniques, couleur d’obsidienne, jouant avec la blancheur du port, l’outremer des bateaux de pêche, le quadrillage insensé des filets de corde enserrant les plages de galets noirs. Elle Lui dit l’odeur des embruns, surtout le soir, la chute parfumée des capsules  d’eucalyptus, les lumières ourlant les criques dès la tombée du jour.

  Les volutes de fumée emplissent la pièce, font comme un tissu onirique accroché aux fenêtres. Il y a des flottements, des fluides légers pareils aux  soirs d’automne à La Salina quand le vent se retire au fond des grottes marines. Continuer à fumer surtout, jusqu’à l’étourdissement. Ne pas déchirer le voile du songe, du souvenir, de la douleur peut-être. Qu’importe. La  seule certitude : cette ligne invisible, ce fil d’Ariane tendu d’un lieu d’absence à un lieu de mémoire.

  Ce soir, à La Salina, la lumière est tremblante, un peu surréelle. Elle est heureuse de cette lumière, de la blancheur de la terrasse, du mouvement des passants, du glissement des voitures devant le port. Elle dit maintenant l’urgence à profiter de la vie, comme si demain était le dernier jour. Elle sait que ce moment est unique. Elle lui dit la chute lente du jour, cette signifiance de l'instant voilé, de l'heure crépusculaire où les choses se confondent, se mêlent dans une espèce de douce harmonie, d'affinité originelle. Elle lui dit ce bonheur du temps impalpable, oublieux de lui-même qui, peut être,  jamais ne reparaîtra, enseveli sous les cendres du passé. Il acquiesce avec un  certain détachement, avec la certitude dont l’investit sa première cigarette, symbole superficiel mais tangible de son entrée parmi les  hommes. Elle Lui sourit. Elle le trouve changé. Elle s’applique à le regarder à la dérobée, à faire son inventaire. Réel travail d’archéologue, pareil à la recherche de l’origine, de la source de cette évidente métamorphose. Elle n’avait pas remarqué, dans la perspective fuyante du front, cette ride légère mais non moins évidente,  comme une blessure à la surface de la terre. D’autres sillons étoilés et naissants s’allument et s’éteignent avec la course du regard, pareils à  de rapides comètes.   Elle a fixé, au plus profond d’elle-même, ces images fugitives, ces marques insignes du temps comme des empreintes toujours prêtes à resurgir.

 

 

 

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4 décembre 2013 3 04 /12 /décembre /2013 15:51

 

Hommage à Irena Sendler.

is.JPG 

 

 

Irena Sendlerowa en 1942

 

 

 

 

(Ceci est un message récupéré comme mail, que je fais suivre

afin que l'action de cette « Juste parmi les nations » soit connue.

Toutes les informations ci-dessous sont communiquées sous réserve

de vérifications plus approfondies. Cependant les informations

glanées sur Wikipédia semblent aller dans le même sens.)

 

 

Irena Sendler

Récemment décédée à 98  ans.

 

Elle demanda pendant la 2ème  guerre mondiale à aller travailler dans le Ghetto de  Varsovie, comme  plombier,  serrurier.   

 

Elle avait  une motivation  bien particulière.  Elle  connaissait les  plans d'extermination des nazis envers les juifs,  elle était allemande.   

 

Irena a caché des enfants dans  le fond de sa boite à outils qu'elle transportait à  l'arrière de son véhicule ainsi qu'un grand sac  (pour les enfants plus grands).   

 

Elle avait aussi un chien à  l'arrière qu'elle a entrainé à aboyer quand les  soldats allemands la contrôlaient  à l'entrée  et à la sortie du  ghetto.  Les soldats ne  pouvaient rien contre le chien qui couvrit en fait  le bruit que pouvaient faire les enfants. 

 

Elle sauva  2500 enfants  en les cachant  ainsi.         

 

Elle fut  arrêtée et les  nazis lui brisèrent les jambes, les bras et la  torturèrent très sévèrement.

 

Irena garda tous les noms des  enfants qu'elle avait sortis du Ghetto et garda ces  noms dans une  jarre en verre enterrée  derrière un arbre au fond de son jardin derrière sa  maison. 

 

Après la guerre, elle essaya de  localiser tous les parents qui avaient pu survivre  et tenta de réunir les familles;  mais  la  plupart avaient été gazées. Les enfants qui avaient  été sauvés ont été placés dans des familles  d'accueil ou ont été adoptés.   

 

L'année dernière elle a été  proposée pour le prix Nobel de la Paix, mais n'a pas  été retenue; c'est Al Gore qui fut primé pour son  film sur le réchauffement de la planète. 

 

En sa mémoire 63 ans plus tard,  je participe à cet anniversaire, très modestement en  faisant suivre ce message.     

 


 

 

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4 décembre 2013 3 04 /12 /décembre /2013 09:05

 

  Mais ceci, on l'éprouvait dans sa chair, on ne le thématisait pas et le concept n'était encore qu'une vague lueur dans un hypothétique horizon. On était dans l'égarement de soi, de la Nature, des phénomènes. On était tremblements, frissons, moraines dressées au seuil de la grotte, acculés à regarder le monde sans pouvoir réellement y participer, le soumettre au pouvoir d'une action, envisager quelque projet qui aurait donné les assises afin d'émerger de toute cette matière hébétée, sidérée d'être simplement là. Le feu céleste on le subissait avec une crainte toute animale, on le dotait de pouvoirs magiques, strictement incompréhensibles. Alors, aveuglés, on courait se réfugier au fond de la grotte, on couvrait son corps meurtri d'hébétude de peaux lourdes au suint fort, à l'enveloppement rassurant. Déjà on instituait dans  cette manière de refuge, dans ce recours au mythe protecteur de la grotte, dans ce ressourcement de soi aux positions natives, on instituait donc, on donnait lieu à ce que, plus tard, la psyché rechercherait avec fébrilité, cette douce conque féminine, cette réserve de chaleur, cette infinie oblativité où apparaître hommes, femmes pourvus d'une direction, d'un savoir sûr, d'un tremplin nous portant vers un avenir, nous ouvrant à la lumière du jour. C'était cela cette longue marche de l'humain vers la reconnaissance du réel, la recherche d'un sens à porter au-devant de soi.

  Alors il fallait graver les signes de la découverte de soi, de l'autre, du monde. Alors, le chiffre balbutiant de l'humain, le lumignon anthropologique, on commença à l'apposer sur les parois de la grotte, comme pour dire l'émergence de la sourde animalité, comme un règne à ouvrir au milieu des ténèbres, un exhaussement à assurer vers une possible parution sur la scène de l'exister. D'abord les mains, ces postes avancés de la conscience, ces empreintes de l'essence artisanale, ces manipulatrices de la terre, de l'eau, du feu, ces antennes brassant l'air de leurs conciliabules gestuels. Les éléments on les retrouvait, on les faisait siens, on les abritait du regard. On en faisait des objets de culte, on les portait à la dignité de prémices de l'art. Des mains négatives d'abord, sans doute chargées de symboliser, d'imprimer sur les amples aires pariétales les contours d'une absence. Oui, avec ceci qui commençait à recouvrir la blancheur du calcaire on pouvait s'absenter alors que le témoin de votre présence demeurait là, gravé dans la mémoire de la pierre.

 

 

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4 décembre 2013 3 04 /12 /décembre /2013 09:00

 

  La nuit éprouvante, les quintes de toux, le souffle à bout de souffle. Elle lutte pour continuer à le sentir fumer, à humer cet espace intérieur qu’Il projette hors de Lui. Elle le retrouve tel qu’en Lui-même. Elle le sent jusque dans chacune de ses volutes de fumée, dans ses arabesques, dans ses figures mouvantes. Elle le reconnaît, Elle le devine, dans son agitation perpétuelle, dans la mouvance qui est comme sa chair intime.

  Elle lutte pour ne pas sombrer dans le sommeil, dans le hors mémoire.

Fumée, volutes, clignotements, creux d’ombre, passages sous des tonnelles, des porches, écailles de lumière sur la crête des vagues, voix, mimiques, glissement du vent dans les ruelles gorgées de soleil. Derrière les yeux définitivement clos, les images se brouillent, s’emmêlent, tantôt claires, couleur de réalité, tantôt irisées.

 

  Il n’a pas bougé de sa chaise, très attentif  à ne pas interrompre  le voyage. Il allume une seconde  Bridge. Ne pas briser le mouvement, le chemin sur lequel Elle s’est engagée. Nouvelles volutes de fumée. Plus fortes, plus persistantes que les  premières. Eviter qu’Elle ne sombre dans l’amnésie. Poursuivre le voyage jusqu’à la fin du jour s’il le faut, dans la demeure dernière où l'ombre se tapit. Elle parle maintenant. Indistinctement. Comme un murmure. Il se rapproche d’Elle pour saisir des bribes, des éclats, des fragments qu’ll reconstitue. 

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3 décembre 2013 2 03 /12 /décembre /2013 10:07

 

  Pour l'heure, la seule voie était de copuler dans les alcôves de pierre, près des ruisseaux, à même la terre pour seulement dire la turgescence de la vie, la promesse spermatique, la longue procession généalogique. Au bout de soi, cette hampe dressée, cette concrétion pareille aux fantaisies esthétiques des grottes, il fallait en faire sa seule parole, sa seule profession de foi. Foi rugueuse, dépourvue d'intentions éthiques, seulement une sourde force de la Nature attelée à son immémoriale tâche de procréation. On était réplique de la bête, duplication du végétal, fac-similé de la pierre. On était sans même en être alertés, on était malgré soi. On était sans être. On était. Socles de chairs lourdes, bassins pléthoriques, on était cette Vénus de Laussel, cette promesse d'aube, ces seins piriformes, cette laitance disponible, cette colline où s'installerait le remuement de l'univers, cette vulve ouverte sur l'interrogation des étoiles, cette corne d'abondance sécrétant le miel et l'encens par lesquels les futurs hommes accèderaient à eux-mêmes par-delà leur lent cheminement au milieu des chutes des lapillis et des bombes mortifères.

 

  On était Hommes-Femmes en devenir, c'est-à-dire consciences commençant à émerger de la longue nuit cosmique. On en ressentait encore le souffle froid venu du plus loin du temps, on en percevait avec effroi l'intime contraction, puis l'immense dépliement, le foisonnement infini, les gerbes d'étincelles, les embrasements, les immenses feux de Bengale parcourant toute la quadrature des choses. De cela on était envahis comme les fosses des abysses se remplissent d'eaux lourdes, sombres et froides, à son insu, malgré sa volonté, en dehors de tout consentement. D'ailleurs on était là d'une manière contingente, en raison d'un sidérant hasard, grâce à une alchimie dont on ne pouvait discerner les cornues dissimulées derrière les voiles impénétrables des arcanes du temps, des complexités de l'espace. 

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2 décembre 2013 1 02 /12 /décembre /2013 09:35

 

  Corps de muscles et abîmes de sang, membres de chair et draperies d'aponévroses, on était cela, cette lente ondulation métabolique, cette reptation à bas bruit dépassant à peine l'herbe couchée des savanes. On était cirons toisés par l'infini mais les élucubrations pascaliennes, les pensées en forme de vrilles, les révélations métaphysiques étaient si loin, tout à fait devant, dans un temps  si long qu'on en devinait tout juste le vortex disparaissant devant la sclérotique soudée de ses yeux. On avançait au monde comme un éthylique pris de vertige dans les remuements ordinaires des alcools bruts. On se déplaçait à coups de pieux, les jambes plantées dans les humeurs de la glaise; on progressait par itératives stridulations, on gagnait l'espace à coups de gong destinés aux rumeurs souterraines. On végétait et peu s'en serait fallu qu'on devînt liane, simple aberration arboricole, lierre s'enroulant autour des tresses aériennes de l'exister.

  Mais les corps grotesques - pieds pachydermiques, mains en battoirs, oreilles fibreuses, jambes d'écorce -, les physionomies grimaçantes, les faces hideuses on ne pouvait les voir, on ne pouvait en prendre la mesure et la conscience n'était que points de suspension, le jugement non encore un mot, le libre arbitre qu'une parenthèse vide. Alors on s'adonnait à des joies toute gemmatiques, à des sentiments granitiques, à des esthétismes de stalactites. On ne pouvait encore prétendre recevoir l'attribut de forme, on était poterie d'argile mais dépourvus de cavité intérieure, d'espace où faire circuler les idées, on n'était qu'une outre aux flancs resserrés, amphore au devenir si étroit que rien n'aurait pu s'y loger de signifiant, d'explicite, de préhensible. Une pure densité de matière. Comme fin en soi. Un ombilic vivant sa vie d'ombilic.

  Les éléments, l'air, l'eau, le feu, la terre, depuis longtemps on les avait oubliés, depuis longtemps on ne savait même plus leur existence. Il aurait fallu, seulement, oser regarder le ciel, goûter le long fleuve de la Voie lactée, compter les braises des étoiles, voir passer le vent, suivre la fuite blanche du goéland, apercevoir les vagues vertes tout en haut de la canopée, disposer sa peau à recevoir le chant du monde. Non, tout cela était inutile, tout cela serait, bien plus tard, une occupation de savants fous, de cosmographes vissant leurs yeux aux lentilles de la connaissance. Pour l'heure, le seul savoir était de marcher le long des corridors étroits des forêts, de saisir des proies, de les manduquer, de laisser couler le sang en filets noirâtres sur l'éperon du maxillaire. 

 

 

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2 décembre 2013 1 02 /12 /décembre /2013 09:25

 

Vérité.

 

 

*Toute vérité s'abreuve à son propre secret.

 

*Plus une œuvre est silencieuse, plus elle est vraie. La vérité est intérieure.

 

*La vérité. Jamais dans le macrocosme, jamais dans le microcosme. Dans leur ajointement. Vérité comme confrontation.

 

*Jamais de vérité nue : seulement travestie.

 

*Les convictions ne sont des vérités pour soi que mesurées à l'aune de la raison.

 

*Une vérité révélée n'est plus une vérité. Toujours la vérité se cache. Lutte contre les évidences.

 

*La vérité est plus "vraie" confrontée au dénuement qu'à la profusion.

 

*Les mensonges des miroirs ne sont qu'à la mesure des intentions que tu leur prêtes.

 

*Souris et pleure au grand spectacle "vrai" du monde : joyeux et pathétique à la fois.

 

*Il n'y a de chair vraie que du milieu. La peau est déjà polluée par le monde.  

 

*C'est lorsque vos certitudes sont bien ancrées que vous êtes le plus menacé par le doute.

 

 

 

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