Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
17 octobre 2013 4 17 /10 /octobre /2013 08:24

 

Homme.

 

 

*L'homme n'est qu'une fiction inscrite à la face du monde.

 

*Tout homme porte en lui l'image d'une île.

 

*L'homme ordinaire n'est tolérant qu'envers lui-même.

 

*Polysémie naturelle de l'homme : du minéral; du végétal; de l'animal.

 

*L'animal en l'homme : le sexe; la guerre; le pouvoir; l'argent.

 

*Il y a beaucoup d'hommes. Peu sont admirables qui sont toujours remarqués.

 

*Tout homme est un mélange des genres : réel; symbolique; imaginaire. Le réel est, à lui seul, incapable d'en rendre compte.

 

*Hommes : beaucoup sont des dormeurs debout. Chute toujours possible. 

 

*Tout homme est nécessairement un démiurge : auto-création.

 

*Androgyne : le souhait de chaque homme, de chaque femme. Connaître les deux faces du miroir.

 

 

Partager cet article
Repost0
16 octobre 2013 3 16 /10 /octobre /2013 08:13

 

"On ne me verra pas, à mon heure dernière..."

 "On ne me verra pas. Enfin invisible. Aux yeux des autres, des inquisiteurs de la Ligne 27 qui reluquent tellement ma nuque, mes épaules, mon dos, mon bassin, mes jambes, qu'au fil des jours je suis devenu une manière de hareng saur se déplaçant sur son pointilleux coccyx, bientôt, anatomiquement réduit à un simulacre, à une brume s'élevant d'un lac solognot par les jours brouillardeux de l'automne. Mais que ne poursuit-on donc mon dépouillement jusqu'à sa logique dernière, au moment où je serais devenu cette feuille privée de son limbe, n'exhibant plus que d'étiques nervures ?"

 "Mon heure dernière.."

 "Celle-ci pût-elle arriver avant même que j'aie pu terminer cette phrase, crayon saisi dans l'air glacé de ma geôle, feuille transpercée de la dernière vérité d'une écriture haletante !

Mais qui donc entendra ma supplique ? Ma prière et pourtant je ne suis pas croyant. Comment croire à autre chose qu'à la finitude lorsqu'on a été abandonné sur le bord de la route, sa vie durant ? Et qui donc se souciera de mon absence ? Olga retournera à son éternel Solitaire, les bibliothécaires à leurs rayonnages, les feuilles du Quai de Bourbon aux eaux boueuses de la Seine. Juste trois p'tits tours..."

 "(j’écris ceci sur mon lit de mort), entouré de prêtres."

 "J'écris, mais quelle audace de prononcer ceci. Quelqu'un sur la Terre a-t-il jamais écrit ? Cela n'est-il pas réservé au calame divin trempant son bec acéré dans l'Absolu qui transcende toute chose de son vol pareil à celui d' Itzam-Yeh l'Oiseau céleste des Mayas ? N'est-ce pas blasphémer, que d'oser prononcer, à la première personne - ô inconscience sans fond de la condition humaine ! -, le geste sacré - j'écris -, d'où naissent les oiseaux, les arbres, l'élévation des montagnes, les eaux profondes des abysses et la fleur de lotus, la seule flottant au-dessus de l'eau, pareille au chat abyssin faisant son arc gracieux tout détaché du sol, léger comme l'Eveillé lui-même.

"J'écris", en termes concrets et ordinaires, en assertions nevidimyjiennes, veut simplement dire "je meurs à moi-même par la trace que chaque lettre inflige, incise, dans la propre densité obscure du hiéroglyphe dont la charge secrète ne consent à se dévoiler qu'au prix de son propre délitement. "J'écris-je-meurs."

  C'est pour cette raison que j'écris sur mon lit de mort. Chaque mot tracé sur la feuille blanche est un ossuaire déjà presque consommé, chaque phrase un exhaussement de catacombe, chaque page un assemblage de croix mortuaires faisant, dans l'air glacé de la mansarde, ses giclures ouvrant l'espace du Néant. De la liberté pure. Mais qui donc, sur la Planète courbe et aveuglée de cendres, est capable de redresser l'échine, de porter son visage émacié au-devant de l'éclat de lumière, de dévisager ce qui voudrait se dire libre et soutenir la confrontation avec l'indicible clarté ? Pour cette seule raison, la liberté est la Mort elle-même reconnue comme telle. Moi, Youri l'Abandonné, je ne consens à l'écriture qu'à l'aune de ma propre disparition. Et Toi donc, Lecteur, ne te désole point d'assister à ma propre fuite dans l'au-delà. Elle n'est que le prélude à la tienne. Seulement, fuyant éternellement cette cruelle vérité, tu crois pouvoir assurer la paix de ton âme alors que tu n'en es que le fossoyeur. La Mort, tous les jours de ta piteuse existence, à chacun de tes pas, à chacun de tes souffles, est collée à ta condition comme la bernique au rocher et, bien sûr, ta vanité de rocher ne s'aperçoit même pas de la succion qui, déjà, l'incline au galet, puis au sable, enfin à la poussière.

  En réalité, cher Lecteur, valétudinaire occupant de la mansarde, pointilleux pèlerin privé de son bâton, tu n'es même plus assuré d'un quelconque appui. Mais regarde donc comme ta marche est erratique, sautillante, comique à souhait. Or, tu le sais, rien n'est plus risible que la Mort. RIEN. Mais nous voilà donc en train, derechef, de nommer le surprenant Néant, l'Incontournable, l'Incoercible dont la Dame-à-la-faux n'est que la figure grimaçante et obséquieuse. Et, du reste, comment pourrait-il en être autrement ? La Mort, piètre serviteur, figure famélique, silhouette ossifiée et hautement relative de ce quelque chose qui la dépasse pareillement à la montagne toisant le monticule dérisoire de la taupe à l'allure chafouine et céciteuse. Car la Mort dont tu fais tes gorges chaudes n'est que l'humble serviteur de l'inconnaissable Absolu. Nul ne saurait nommer le Néant et, à plus forte raison, le décrire, en dresser les contours selon une plausible métaphore. C'est pour cela que les hommes l'ont habillé de guenilles et d'oripeaux, qu'ils ont inventé Dieu, le Diable, les Anges, les Saints, les Religieux et leur cohorte claudicante de gens de robe, prélats vermoulus, évêques à la crosse nécessiteuse, curés aux oreilles mangées par les mites, prêtres au goupillon glaireux tout juste en pensant à la Vierge Marie.

  Mais Lecteur incrédule et indécrottable, croirais-tu, par hasard, que je sois présentement en train de plaisanter, d'inventer quelque sotie afin que des miséreux émus vinssent applaudir mon délictueux spectacle ?  Mais es-tu si abscons et refermé étroitement sur ta bogue que tu ne puisses éveiller la flamme de ta conscience qu'à illuminer faiblement le bout ulcéré et recroquevillé de tes piquants ? Mais serais-tu, à ce point, nul et non avenu que tu ne puisses figurer que par défaut comme l'inconséquence que tu es depuis les siècles des siècles ?

Mais cessons nos invectives. Elles ne contribuent qu'à obscurcir un tableau déjà bien sombre. Moi, ou celui que je crois être, dont la nomination Youri Nevidimyj, n'est autre chose qu'une vibration verbale commise à me faire apparaître aux yeux des autres le temps de ma nomination - mais, en réalité, moi, comme toi, comme tous les Fugitifs sur Terre, ne sommes que des spectres reflétant l'abîme sans fond dont nous nous croyons toujours exclus, alors que nous en sommes les représentants les plus sûrs, immédiatement perceptibles, provisoirement incarnés, doués de parole, mais c'est le Néant qui parle en nous, l'Absolu qui nous revendique comme sa possession ultime, indépassable, dernière probabilité qui nous est offerte afin que nous commencions à y comprendre quelque chose à cet écheveau que l'homme s'est complu à compliquer à l'infini, faisant du fil originel, premier, qui le reliait au pur Néant directement accessible, une pelote obtuse, enchevêtrée, sans début ni fin, comportant toutes sortes de nœuds dont tout un chacun s'occupe plutôt que de chercher à en percevoir la forme initiale, simple, interprétable, hautement lisible. C'est ainsi, l'homme dirige sa myopie sur la densité de l'écheveau, ses voltes et ses arabesques facétieuses alors que le pur objet qui lui a donné lieu est simplement remisé aux objets perdus, quelque part dans un lointain nébuleux."

 

Partager cet article
Repost0
16 octobre 2013 3 16 /10 /octobre /2013 08:03

 

Homme.

 

 

*Inversion de l'interprétation heideggérienne : Parfois la chose est plus riche en monde que l'homme, d'où le sentiment de l'absurde.

 

*Hommes : admirables, remarquables, détestables. Sort polysémique de toute humanité.

 

*Jamais de repos pour l'homme . Battement continu du sens. Diastole - systole.

 

*Approcher d'un iota la complexité d'un seul être, il y faudrait l'éternité.

 

*Des activités physiques, seule la marche est à la mesure de l'homme. Le reste n'est que précipitation.

 

*L'homme tolérant, le vrai, mettez-le sur un piédestal. 

 

*Peu d'hommes sont des phares, beaucoup des lucioles.

 

*L'enfant n'est pas le diminutif de l'homme. Promesse d'avenir, il est ouvert au déploiement.

 

*Impudeur : strip-tease de l'âme.

 

 

Partager cet article
Repost0
15 octobre 2013 2 15 /10 /octobre /2013 08:13

 

 

     La mansarde  ou la perdition du jour.

 

  Maintenant, Lecteur, te jugeant assez informé du cas Youri Nevidimyj, t'étant infiltré dans les corridors de mon intimité, ayant parcouru à bas bruit les arcanes de ma condition schizophrénique - sans doute as-tu perçu combien ma piteuse existence est fragmentée, un morceau à Pétersbourg, un autre dans l'orphelinat post-révolutionnaire, un autre encore dans les services d'aide aux plus démunis, encore un autre à la proue de Saint-Louis, un supplémentaire dans le bus de la Ligne 27, puis un crochet par le fameux Omnibus de Maldoror, puis à nouveau plein de débris épars, selon les bons vouloirs de mon infinie déambulation parmi les errances de la ville, dans telle ou telle bibliothèque, dans tel ou tel musée, dans cette salle des pas perdus de l'immense gare ou parmi les flots continus de migrateurs des quais ou bien sous les coupoles ouvragées des grands magasins - eh bien, cher Prédateur, car avoue-le donc, tu n'es que cela, tournant les pages de mon précieux incunable orné de mes gribouillis nauséeux, tu n'es qu'à la recherche de ce qui, encore, pourrait me confondre, m'envoyer, sans détours, en Place de Grève, au pied de l'échafaud avec, pour unique serviteur, discret autant que policé et efficace, ce bon Docteur Guillotin s'impatientant de savoir si sa fidèle lame, cette Durandal au fil brillant comme la gloire consent toujours à accomplir ses basses œuvres.

  Ô, Lecteur épargne-moi la peine de te dire combien ce serait un ravissement, pour toi et tes semblables, de voir ma tête rouler parmi la sciure et console-toi d'avance, ce serait, pour moi, un encore plus grand ravissement. Mais tu devras surseoir encore un instant à ton juteux plaisir car tu ne saurais faire l'économie de quelques uns des épisodes de mon existence, lesquels pour ne pas être glorieux, n'en sont pas moins hautement estimables pour un Lecteur en quête de pures jouissances terrestres. Je projetais de t'emmener dans une grande bibliothèque où je t'aurais fait découvrir, par le menu, te prodiguant force détails, ces ouvrages par lesquels me parvient mon oxygène quotidien. En effet, c'est bien de ces compagnons discrets, toujours disponibles, mystérieux à souhait, insondables à force de savoirs cumulés, que je tire l'énergie suffisant à entretenir la flamme de mon lumignon étique. Car c'est bien d'eux que me vient mon salut provisoire, de la chaude intimité dont m'assurent leurs pages, du fourmillement fascinant auquel se livrent les signes noirs imprimés sur la livide page blanche que j'exhume une dernière volonté de vivre afin, qu'encore, tant qu'il en est temps, je puisse me livrer au déchiffrement de ma propre énigme.

  Scindé par l'Histoire, oblitéré par ma propre fable, ligoté par les multiples fictions dont les autres m'entourent, ou plutôt m'assiègent, je n'ai de cesse de progresser parmi les plis de ténèbres dont mon cheminement sur Terre est la piètre mise en musique. Je ne sais si la Mort - tu remarqueras que j'ai pris le soin de mettre une Majuscule à l'initiale du mot, tout comme j'ai l'habitude de le faire lorsque je nomme le somptueux Néant, la suprême liberté dont l'homme ne peut être atteint qu'à l'aune de sa disparition, de son effacement total du monde, y compris de la mémoire de ceux avec lesquels il a eu à entretenir un quelconque commerce - je ne sais si La Dame-à-la-faux m'en fournira les clés ou bien s'il me faudra encore composer avec elle, l'énigme, de manière à ce qu'elle me révèle, comme dans un suprême haut-le-corps, la pelote de régurgitation dont ma vie est détentrice depuis mon premier souffle et qu'elle ne consentira, peut-être, à me restituer uniquement lors de ma dernière respiration.

Donc, immense Lecteur à la conscience torturée du seul fait que la mienne conscience  l'est encore plus que celle que tu prétends posséder tout en donnant la preuve, à chacun de tes mots, au moindre de tes actes, qu'elle ne te visite que bien trop rarement, tout occupé que tu es à une vaine curiosité dont tu espères qu'elle te donnera le savoir absolu te sauvant des griffes de l'incomplétude; donc, très honorable Lecteur, c'est à mon dernier chevet que je te convoque afin que tu puisses assister au spectacle, unique en son genre, de l'ancien moujik confronté à sa troublante énigme. Laquelle m'a poursuivi, toute ma vie durant, pareille à mon ombre dont je devinais la sombre présence sans, toutefois, qu'elle se manifestât en aucune manière, si ce n'est, précisément, par sa vacuité, son abîme généreusement commis à recevoir l'obole de ma piètre existence.  Cependant, je ne sais si un tel concept tellement proche de la notion du vide absolu parlera en quelque façon à ton entendement et je crains fort que tu  ne renonces, avant la fin, à poursuivre ton voyage, hissé que tu es sur le siège du Cocher que je suis, Cocher te conduisant peut-être à ta perte ou bien même à nos deux pertes conjuguées. Toute lecture en profondeur est de cette nature. Il faut toujours consentir à mourir un peu, à chaque chapitre, chaque page, chaque paragraphe.

Mais approche-toi donc, homoncule, de mon semblant de corps. Il n'est en réalité qu'amas difforme d'écritures embouclées, de lettres enlacées, de pleins et de déliés dont tu devras consentir à faire ton ordinaire, afin qu'abandonnant tes habituelles nourritures terrestres - cochonnailles et autres tripes à la mode du pays -, tu te délestes de tes lourdeurs cellulitiques et qu'enfin, ton esprit - en supposant qu'il te visite parfois - , délivré de ses brumes, parvienne à s'élever à des hauteurs suffisantes. Alors, de concert, nous naviguerons  vers de nouvelles contrées, dont, pour l'instant, il serait inopportun de dresser les contours.  Mais arrêtons là nos aimables divagations et occupons-nous plutôt du Chant Premier de Maldoror. Et essayons d'y apporter un peu de notre non-savoir d'irrémédiables pourceaux croyant avoir accès au sens de toutes choses pareillement à l'âne étirant son cou nécessiteux vers la mangeoire salvatrice.

  Et, Lecteur, pendant mon soliloque sur mon lit d'agonie et de questions coruscantes comme la giration des planètes dans le cosmos, garde-toi bien d'agiter ta langue sirupeuse et enrubannée de questions idiotes et hémiplégiques, lesquelles ne feraient que me distraire de ma propre fin dont tu sais bien que j'attends tous les bienfaits cachés dans l'au-delà des hommes. On ne sait ce qu'il est en réalité, si ce n'est que l'humaine condition en est absente, ce qui, déjà est la plus vive des satisfactions qui se puisse concevoir. Et si, depuis le retrait de la mansarde dans lequel tu te tiens, dans une attitude hiératique - est-ce donc le visage de la Mort qui t'effraie tant ? -, tu consens seulement à regarder la Grande Faucheuse faire ses fenaisons  définitives, alors peut-être comprendras-tu où se situe ton intérêt et réserveras-tu, sur-le-champ, ta concession à perpétuité dans le premier carré de terre venu. Car tu ne saurais mieux faire. Mais laisse-moi donc, maintenant face à mon Destin. Nous avons, tous les deux, plus d'un compte à régler.

  Ceci étant formulé avec clarté et conviction, Nevidimyj, allongé sur son havresac mangé par les rats, éclairé par l'avaricieuse lumière de la mansarde du septième ciel où le non-amour le retient obliquement, tenant le volume des "Chants" d'une main assurée, tournant les pages maculées de notes et de traces de doigt poisseuses, peccamineuses pour tout dire, spermatiques, la littérature ayant toujours constitué, pour le lecteur qu'il a toujours été, une activité hautement érotique, Youri donc, comme en extase, le regard fiévreux, les paupières comateuses, les lèvres enflées par la manducation sacrée des signes et des lettres, alors que, dans l'embrasure de l'ouverture crépusculaire se tient le Lecteur, vous-même, saisi de crainte et d'effroi face à ce qui ne saurait tarder à survenir : la Mort ou bien la Vérité. Ce qui est la même chose. Enfin, si vous avez compris cela, vous venez de dérider vos cerneaux poisseux, leur apportant l'infime lumignon qui leur manquait quant à une intelligence adéquate de l'existence et, déjà, votre corps de papier se convulse sous la poussée des phrases et des lettres, enfin vous consentez à entrer dans le livre, union fusionnelle dont, vous le savez en cet instant précis, vous ne ressortirez jamais, victime des Lettres, de leur voracité, de leur intransigeance. Ou bien vous devenez Lecteur et vous consentez au sacrifice. Ou bien vous demeurez sur le seuil, empreint de cécité qu'aucune lumière ne saurait féconder. Mais assez disserté. Il ne sert jamais à rien de différer les rencontres, fussent-elles fatales !

 

Partager cet article
Repost0
15 octobre 2013 2 15 /10 /octobre /2013 08:04

 

Génie.

 

 

*Il n'y a de génie proclamé que post mortem.  Relation singulière au temps.

 

*Le génie brûle tout ce qu'il touche : Picasso.

 

*Le génie : lucidité à son point d'incandescence.

 

*Des génies : Leonard de Vinci - Victor Hugo - Honoré de Balzac - Lautréamont - Artaud

 

*Le génie de Balzac : la "seconde vie" ou être à la fois lui-même et 6000 Autres.

 

*Araignées d'eau, nous glissons sur l'eau. Le génie, lui, a traversé le miroir.

 

*Génie : un funambule sur le fil étroit tendu entre immanence et transcendance. Toujours au-dedans et au-delà de soi.

 

 

Partager cet article
Repost0
14 octobre 2013 1 14 /10 /octobre /2013 19:20

 

Et les couleurs se sont enfuies…

 

 

 (Sur une photographie réaménagée

et un texte de

Pierre-Henry Sander).

COULEURS 

 Source : non identifiée.  

 

 L'écriture en partage. Facebook paraissant avoir pour vocation essentielle de favoriser le partage, le texte ci-après voudrait répondre à cette exigence. Manière d'écriture à 4 mains, d'entrelacement du texte de Pierre-Henry Sander avec le mien. Ecriture que prolonge une autre écriture dont nous souhaiterions que le lecteur s'empare afin de continuer la tâche entreprise.

Le texte en graphies rouges est le texte originel de son Auteur. Celui en graphies noires est mon apport personnel dont je souhaiterais qu'il soit perçu dans un prolongement tissé d'affinités avec cela qui fait sens et autorise ainsi la poursuite d'une mince tâche herméneutique. ]

 

"Temps d'ouest chargé de pluie.. des questions me ramènent à cet univers sombre et dangereux .. le crépuscule tombe en son puits sous la lampe du soir.. l’instant présente à perte de vue une ombre épaisse.. la nuit incurablement blanche sera comme une tombe pour le veilleur que rien n'endort.. morsure d'infamie et de larmes encore chaudes.. qu'ai-je eu de jours heureux, d'heures paisibles.."

 

 

"Temps d'ouest chargé de pluie..la vue est si basse qui frôle l'horizon de son aile déserte et les collines sont des perditions dans l'à-peine clameur du jour. Mais où l'éclaircie, où la faille par laquelle le ciel délivrerait ses cataractes lumineuses ? Où, la conscience qui viendrait éclairer l'aridité urticante des nuages ? Tout est si empreint de désolation, tout si dénué de sens sous la courbure grise des heures. Teintes de plomb, lissées d'étain, longues coulures de zinc à l'aplomb des toits. Errent les corbeaux sur les sombres épis de faîtage. Plus de langage que cette vague rumeur dans les rainures des rues, cette mélopée se hissant à travers les soupiraux griffés de lignes mortifères

.. des questions me ramènent à cet univers sombre et dangereux ..à cet univers de graphite et de suie; questions qui envahissent ma cochlée, y disséminent les cris de la folie, y distillent les alcools de l'ennui, y sondent l'âme métaphysique des choses; pourquoi en est-il ainsi ? ; pourquoi de l'étant plutôt que rien ?, litanie leibnizienne étendant ses ramures dans les cerneaux gris du cortex, giclures questionnant l'azur perdu des souvenirs, existentialisme plongeant sa noire racine jusqu'à la fêlure occipitale, là où éclatent les images en milliers de fragments, en millions de diagonales étoilées, en faisceaux aponévrotiques blanchis par l'usure du temps, ô questions qui plantent leurs dards dans ma peau morte - on dirait celle des momies -, ô questions qui entourent mes membres de leurs bandelettes étroites - on dirait les tuniques serrées des chrysalides -, ô questions de questions qui n'en finissent de faire leur ballet et mon  front saigne et mon nez s'amenuise en étroite meurtrière  et mes lèvres se soudent, deux lames de rasoir entaillant le silence et le silence faisant son écho vide

.. le crépuscule tombe en son puits sous la lampe du soir..mais écoutez le bruit, le grésillement des interrogations, mais happez ce qui passe à portée de vos yeux de larves, vous les humains qui en même temps que moi vivez, oyez ces justes inapparentes coruscations de la pensée qui, bientôt s'éteindront, qui font leurs petites cavalcades, qui ruent et font scintiller leurs sabots de corne avant que de disparaître dans la plus grande confusion; mais tendez donc vos mains-lanières-de-cuir, vos doigts-lianes, vos idées-fouets et rien n'y restera que le vide, un imputrescible néant, la ténèbre dans son insondable beauté car, comme moi, vous l'avez voulue, cette ténèbre, ce mur d'incompréhension contre lequel vous avez usé vos ongles impénitents, vos doigts gourds à force de menus entrechats intellectifs, de questionnements itératifs tournant à vide et, maintenant

.. l’instant présente à perte de vue une ombre épaisse..si dense que même votre figure s'y dissout, que votre beau visage tragique s'y confond, que vos mouvements y disparaissent dans une étrange confusion d'eux-mêmes - entrelacements ophidiens semblables à quelque Ruban de Möbius - vous voilà donc arrivés au pays de l'incouleur, du chromatisme fou qui vient tout juste de retourner sa calotte, voyez ses viscères de charbon, ses nervures grises, ses revers de cendre et de lichen, ses entours de pierre éteinte, ses épanchements de lave - un paysage géologique désolé sous un ciel vide - , voilà où vous ont amenés vos questions impertinentes, vos interrogations stériles, tout au bord de l'énigme que nul mortel ne pourrait faire se révéler qu'au prix même de sa vie. La physique est pour l'homme, la métaphysique pour les êtres sans corps, vous savez ce fameux "corps sans organes" du Philosophe, mais quelle plaisanterie, jamais vous ne vous absenterez de votre corps, sauf délivré de l'existence, ce boulet, cette paillasse sur laquelle vous vous prélassez sans même vous apercevoir qu'elle vous boulotte depuis une éternité et en cet instant de sublime révélation, vous voici, soudain, privés de couleurs, ces hautes sphères de compréhension, ces éclaboussures du sens, ces diapreries mentales indépassables, tout ceci, cette profusion dont vous vous nourrissiez, vous l'avez constamment asséchée, plongeant dans l'eau vitale vos hauts pieds de palétuviers, remuant le limon qui vous avait mis au monde, troublant l'eau qui baignait votre corps, aspirant de votre inconscience majuscule jusqu'au plus infime nutriment et voici que vos questions de questions vous ont conduits dans un bien étrange pays où la nuit féconde, la nuit poétique s'est vidée de sa substance, de sa réserve parlante et désormais

.. la nuit incurablement blanche sera comme une tombe pour le veilleur que rien n'endort..pour le piètre veilleur que, tous, tour à tour, nous avons été et que, maintenant, plus rien ne visite qu'une décoloration de la terre - cendres, cendres, cendres -, qu'une usure du ciel - eau sépulcrale, sépulcrale, sépulcrale, eau venue nous dire en langage ouranien la

.. morsure d'infamie et de larmes encore chaudes..qui sera notre unique destin, notre seule liturgie face à l'incommensurable démesure dont notre légèreté aura été le scrupuleux et empressé architecte, le fossoyeur de génie moissonnant le peu de cervelle qui restait attachée à notre dure-mère incontinente - privée de continent pour la parole, une parole mesurée s'entend, non le prurit de langage dont nous étions les indigents supports - et ce n'est que justice si la détresse nous étreint, la détresse blanche, la tombe ouverte sur un monde livide, un horizon illisible sur lequel ne s'imprimeront plus les hiéroglyphes de la mémoire, les signes du souvenir, les pattes de mouches de nos premières hésitations enfantines qui, sur des feuilles blanches, s'essayaient à tracer, malhabilement, les stigmates de la vie; nous ne sommes plus réduits qu'à être des corps sans corps, des idées sans idées, des polyphonies sans voix, des polychromies sans luxuriance, des problématiques sans problèmes, des paroles sans mots qui n'auront même plus à formuler quoi que ce soit de l'ordre de l'existence;

.. qu'ai-je eu de jours heureux, d'heures paisibles..tout ceci, cette touchante interrogation au sujet de nos vies passées résonnera dans le vide, nous aurons perdu nos âmes en même temps que nos couleurs !"

 

 

Partager cet article
Repost0
14 octobre 2013 1 14 /10 /octobre /2013 09:15

 

Nous sommes un arbre levé dans l'azur.

 

 

arbre 

Photographie : Blanc-Seing.. 


  Le retour aux sources, là où nous sommes nés à nous-mêmes, sur une terre nourricière, près d'un paysage fondateur, dans la vibration d'une culture particulière, ce retour, ce cheminement tiennent d'une féerie en même temps qu'ils signent une douleur. Comment, en effet, ne pas éprouver d'émotion, ne pas ressentir en son tréfonds que ce sol que nous foulons, cette ville dans laquelle nous nous immergeons, nous habitent de l'intérieur de la même façon qu'un sentiment nous étreints et nous porte parfois à témoigner, mais dans la confidence, l'intimité. Dans ces moments précieux où l'unité de notre être se révèle, rassemblant en un même creuset les fragments épars de notre existence, l'oreille d'un ami est toujours une aide précieuse. Car seulement celui, celle dont nous avons gagné la confiance, pourront recueillir la pure gemme ourlant nos lèvres éblouies. C'est bien d'un éblouissement dont il s'agit, dont nous devons rendre compte, à nous-mêmes, d'abord, à l'ami ensuite, afin qu'une trace mémorielle subsiste après que l'événement sera passé.

  Tout individu, au cours de sa vie, a foulé quantité de sols, multiplié les rencontres, s'est ouvert à nombre d'expériences multiples et variées. L'existence comme un puzzle, le corps comme une diaspora. Tout nous sommes des êtres de partage, des êtres éparpillés en des milliers de menus hasards, des êtres livrés à un constant égarement. Alors nous cherchons comment sortir de cette condition schizophrénique, comment relier les parties éparses, trouver le miroir dans lequel notre vue pourra s'affairer à la synthèse, rassembler le divers afin que l'unité retrouvée, nous puissions nous remettre en chemin.

  C'est toujours en vue de rassemblement sur soi des significations que nous entreprenons ce retour vers la terre de nos ancêtres qui est aussi la nôtre, le lieu de notre enracinement, l'aire de nidification originaire où les conditions furent réunies qui participèrent à notre propre éclosion au monde. Car renier sa terre constitutive reviendrait à  saper les structures qui concourent à notre propre édification. Jamais l'abri ne saurait tenir sans ses fondations, jamais l'arbre croître sans la nappe rhizomatique qui l'assure d'un lieu, d'une assise, d'une parole s'ouvrant dans l'éther. Sans doute la métaphore de l'arbre, par sa riche symbolique, est-elle la mieux fondée à nous introduire à la compréhension de ce que nos événements premiers ont imprimé en nous de force, d'énergie, de volonté de paraître selon notre singularité. Car le-sol-pour-toi n'est jamais le-sol-pour-moi. Il y a certes des confluences, des parties communes, des participations  à la même poussière mais le trajet de la sève est unique qui pousse notre être à réaliser son essence.

  Ainsi, notre quête est-elle toujours reliée au paysage, au chemin qu'on parcourut autrefois, au brin d'herbe dans le creux du fossé, au caillou, à la fontaine que cache un tapis de verdure. Nous avons besoin de cette présence modeste mais nécessaire à la configuration de notre présence actuelle. Toute remontée vers la source - nous sommes des saumons -, s'inquiète d'une telle quête dont la chose ramassée sur le chemin d'enfance témoignera, faisant ses gerbes étoilées lorsque l'ennui surgira ou bien la détresse, laquelle, en dernière analyse, n'est que la perte de nos polarités essentielles. Sans amulette, sans encrier qui, jadis, nous servit à poser les premiers mots sur le papier, sans objet investi d'une aire magique, nous flottons infiniment dans les vêtures trop grandes du destin, nous nous égarons parmi la multitude identiquement au gyroscope fou.

  Afin de coïncider à la quadrature du monde, c'est à la nôtre qu'il nous est intimement ordonné de consacrer une partie de ce temps précieux, seulement justifiable à l'aune d'une urgence à nous y retrouver parmi la grande dérive existentielle. Les mémoires, journaux et autres biographies n'ont d'autre objet que de doter celui qui écrit d'une nécessaire boussole ontologique. Car de l'être, il ne saurait y en avoir qu'à la mesure d'une entente avec le monde, avec nous-mêmes en premier lieu. Ce premier lieu de notre naissance dont nous croyons toujours nous éloigner alors que nous sommes constamment  en orbite autour de ce qui fut l'étincelle première par laquelle une clarté put paraître et que, toujours, nous recherchons.

 

 

 

 

 

 

 

   

Partager cet article
Repost0
14 octobre 2013 1 14 /10 /octobre /2013 09:02

 

"L’omnibus a disparu à l’horizon, et l’on ne voit plus que la rue silencieuse… Il s’enfuit !… Il s’enfuit !… Mais, une masse informe ne le poursuit plus avec acharnement, sur ses traces, au milieu de la poussière. Voyez ce chiffonnier qui passe, courbé sur sa lanterne pâlotte ; il y a en lui plus de cœur que dans tous ses pareils de l’omnibus. Il vient de ramasser l’enfant ; soyez sûr qu’il le guérira, et ne l’abandonnera pas, comme ont fait ses parents."

 "Voyez vous, je le savais. Le Chiffonnier. Quelle belle faveur que l'intuition, tout de même. Sans doute la seule dont mon triste sort ait bien voulu me faire le présent. Comprendre les choses avant même qu'elles ne se présentent à vous, avant même que les plus menues prémices d'un possible accomplissement n'aient pris forme. Y aurait-il à voir avec la rêverie dont Lombano avait été atteint au moment où ma propre révélation inonda l'horizon d'une conscience bien disposée à l'accueil des événements ? Sans doute. Mais il y aurait tant à dire quant à la compréhension, à l'intelligence du monde par l'éveil humain. Mais revenons au Chiffonnier, et ce ne sera pas une inutile digression, puisque aussi bien, ce dernier, semble doué d'une ouverture suffisante à ce qui fait phénomène devant lui à la mesure de l'énigme. L'homme est courbé, probablement à le recherche d'une fuyante vérité. La courbure, le rassemblement en un lieu clos de l'esprit, de l'entendement, sont en effet nécessaires à la préhension par les facultés de quelque chose comme une révélation. La dispersion, le renversement de la position, manière de parenthèse largement ouverte sur l'éther, regard rayonnant aux quatre horizons des fuites sidérales eût porté en lui, dans sa forme propice à la diaspora mentale, les conditions mêmes du dessaisissement du réel pathétique dans lequel l'enfant blessé, moi en l'occurrence, s'était racorni comme immolé une seconde fois par un destin cruel, la première fois étant seulement une naissance inadéquate.

Ô Voyageurs de l'impériale, que ne vous retournez-vous pour apercevoir ce brave homme courbé sur sa lanterne pâlotte ? Et alors, en admettant que vous fussiez assez curieux de vérité pour faire pivoter vos cous déplumés d'autruches inconséquentes, dont tout le monde connaît l'inclination à dissimuler la tête sous le sable, n'eussiez-vous point deviné que ce faible lumignon était l'icône d'une lumière plus grande encore, je veux dire de la conscience ouvrant le champ de toutes les significations qui parcourent constamment l'univers, pareilles aux queues fusantes des rapides comètes ? N'eussiez-vous point été alertés par sa clarté unique, sa persistance à briller même au cœur de la plus vive tempête ?Car jamais l'étincelle ne s'éteint, si ce n'est aux yeux des ignorants, des insensibles et des mort-nés de l'existence qui, avant que de croître dans l'espace à eux dévolu, se fourvoient toujours dans quelque fosse emplie d'une misérable obscurité. Et ne vous seriez-vous interrogés sur la modeste nature du généreux Chiffonnier, vous accordant, pour une fois, à admettre du fond de votre égoïsme foncier que vous portez chevillé au corps, comme les Saints portent le scapulaire jour et nuit, à admettre  que l'indulgence, l'attention aux autres sont bien souvent inversement proportionnelles à la dimension de la bourse de leur possesseur ? 

Le cœur du Chiffonnier bien plus vaste que tous les cœurs à l'unisson des bourgeois et des femmes de grande vertu qui épousent les flans de l'Omnibus, l'âme en paix, ne cherchant nullement à savoir si le monde existe VRAIMENT, hors de ce cocon douillet. Mais les plus éveillés d'entre vous - si, toutefois une telle grâce peut leur échoir -, auront bien compris dans quelle impasse s'est fourvoyé le brave Chiffonnier qui ne pourra pas sauver, à lui seul, ce que le destin et l'Histoire ne sont pas parvenus à mettre à l'abri du danger. Car là est bien le tragique qui me saisit à chacune de mes respirations, me rive au sol lors de chacun de mes pas, moi, Youri Nevidimyj, ou le mirage feignant de l'être, sommes irrécupérables, vieille guenille se confondant avec le sol d'anonyme poussière. Jamais on ne sauve l'abandonné qui n'a plus d'identité à laquelle se raccrocher, plus de lieu où rassembler ses fragments épars, d'esprit au sein duquel pouvoir s'imaginer. Merci, vieux Chiffonnier pour ta sollicitude vraie. Elle m'est déjà d'un grand secours. Elle est l'haleine chaude que mes doigts recueillent lorsque la bise souffle au travers du désert de la mansarde. Elles est le "bonjour" de ma Concierge, rassurant et maternel, même si je feins de ne lui prêter aucune attention. Elle est la gorgée de bouillon qui, l'hiver, m'empêche de me transformer en stalagmite de glace. Merci, vieux Chiffonnier et que ton âme aille en paix !"

 "Il s’enfuit !… Il s’enfuit !… Mais, de l’endroit où il se trouve, le regard perçant du chiffonnier le poursuit avec acharnement, sur ses traces, au milieu de la poussière !… Race stupide et idiote ! Tu te repentiras de te conduire ainsi. C’est moi qui te le dis. Tu t’en repentiras, va ! tu t’en repentiras."

 "Ainsi dit le Chiffonnier, ainsi semble-t-il vitupérer et condamner sans appel. Mais sa rage n'est froide et ulcérée que parce qu'il désespère de l'homme, il l'aimerait tellement bon, à défaut d'être parfait."

 "Ma poésie ne consistera qu’à attaquer, par tous les moyens, l’homme, cette bête fauve, et le Créateur, qui n’aurait pas dû engendrer une pareille vermine. Les volumes s’entasseront sur les volumes, jusqu’à la fin de ma vie, et, cependant, l’on n’y verra que cette seule idée, toujours présente à ma conscience !"

 "Oui, Lautréamont, oui Comte génial qui trempes ta plume dans le vitriol mais surtout dans le sublime - que personne ne s'y trompe, la calomnie, l'objurgation, l'invective ne sont souvent que la face cachée de la générosité -, use donc toutes tes forces à crucifier l'homme et ensuite, fais-en le don au Créateur, ce magnifique Démiurge habile à sortir de ses cornues diaboliques, crimes et viols, assassinats et bassesses ultimes, trahisons et faussetés de tous acabits. Mais soyons donc indulgents à son endroit. Qu'en tant que Démiurge, il inverse donc ses formules diaboliques et  s'annule lui-même. Le Créateur incréé : tout comme Youri Nevidimyj, votre Serviteur qui, depuis l'union des opposés qui présidèrent à son apparition,  se débat dans le tube infernal, l'éprouvette diabolique, qu'on appelle simplement "La Vie".

Mais, Lecteur, au risque de te décevoir, toi qui t'impatientes de découvrir le prochain de mes malheurs, triturant un à un les grains de buis de mon chapelet existentiel, - il y aura encore plein de surprises, rassure-toi -, je me hâte de regagner ma mansarde où m'attend ma sombre et humide paillasse. Il est vrai, je n'ai guère à me plaindre, les rats, de leurs chaudes fourrures grises, me protègent de la froidure hivernale !

 

 

 

Partager cet article
Repost0
14 octobre 2013 1 14 /10 /octobre /2013 08:49

 

Génie.

 

 

*Le génie, un accident parmi les hommes. 

 

*Le génie métabolise les pensées comme l'homme les faits divers.

 

*Le propre du génie : penser beaucoup plus qu'il ne dit.

 

*Le génie n'est jamais étonné de lui-même mais des Autres.

 

*Le pouvoir du génie : livrer une étincelle de l'infiniment grand aux infiniment moyens que nous sommes.

 

*Dans la paramécie, l'homme ordinaire perçoit simplement l'acte, le génie la puissance.

 

*Limites du génie : le corps.

 

*Le génie fait surgir le sens là où l'individu ne voit qu' anecdote.

 

 

Partager cet article
Repost0
13 octobre 2013 7 13 /10 /octobre /2013 09:16

 

Le visage distancié de la douleur.

 

 

(Sur une proposition minimaliste de

Milou Margot).

 

pluie 

 Photographie : Blanc-Seing.

 

 

"Dans quel parler tombe la pluie sur les villes de la douleur ?"

                                    Milou Margot.

                                   

  

  La spirale de votre langue, repliez-là comme le fait le caméléon; l'enroulement de votre cochlée, réduisez-le à la taille du silence; le bouton de votre ombilic, amenuisez-le jusqu'à le porter au seuil de l'invisibilité. Et soyez disponibles aux langages qui habitent le monde, alors que votre cheminement est une hésitation au bord d'un marécage habité de lourde insignifiance. Mais seriez-vous sourds, hermétiques, tellement soudés à votre cocon carné que vous n'apercevriez même plus les paroles qui sillonnent la terre de leurs dents muriatiques ? Mais cela parle  autour de vous, mais cela fait ses écoulements continus et votre peau en porte les stigmates liquides, les infinis ruissellements, la pluie acide, comme si elle voulait ronger, attaquer, dissoudre et, à la fin, se fondre dans vos humeurs corporelles.

 

"Dans quel parler tombe la pluie sur les villes de la douleur ?"

 

  Mais n'entendez-vous pas cette continuelle litanie tombant du ciel, ces manières de cantiques venant à vous dans une onde vibrante de supplication, cette vivante liturgie faisant ses allers-retours incessants depuis le ventre gras des nuages jusqu'à la bonde vertigineuse de votre conscience ? N'entendez-vous pas ? Non, ce n'est pas Dieu qui s'adresse à vous, pas plus que les anges qui déploient leurs ailes vaporeuses afin que vous puissiez, enfin, goûter aux joies célestes. Non, c'est plus tendu, plus incisif, ça veut forer en vous, taillader votre esprit, ronger votre âme jusqu'à sa dernière pellicule. Et, du reste, à quoi bon lever vos yeux glauques vers le ciel si ce n'est qu'à y deviner un temps dissous, un espace non préhensible, une arcature livrée à sa seule contemplation ? Car vous vous égarez constamment dans de bien étranges considérations arbustives. Vos sublimes turgescences, certes, vous les destinez à l'éther, vous les portez à l'extrême pointe de vos ramures et vos doigts sont des vrilles qui s'enroulent infiniment, avortées avant même d'avoir vécu. Des remugles d'inconséquence. Des replis laborieux d'illucidité.

 

"Dans quel parler tombe la pluie sur les villes de la douleur ?"

 

  Mais cette question de la pluie, de son langage, la dimension de la ville, le creuset de la douleur, en avez-vous au moins été alertés en quelque manière ? Car rien ne sert de sillonner en tous sens les cannelures des rues, de lever les yeux en direction des vitrines aux éclats aveuglants, de s'engouffrer dans les salles obscures gonflées d'images et puis de retourner dans vos antres étroits, la vue basse, les oreilles dévastées de musiques, la peau habitée de fourmillements d'impatience, langue sèche remisée au silence. Et vos paquets consuméristes, les aurez-vous à peine dépliés qu'ils se confondront à gésir à terre comme d'inutiles guenilles. Et vos écrans bleutés, que vous apprendront-ils sur vous, si ce n'est une immense et vertigineuse désolation. De soi, on n'apprend rien à partir d'une vacuité mondaine. De soi on n'apprend jamais qu'à partir de soi, en interrogeant, fouillant, retournant la moindre bribe de connaissance, comme le fait le tamanoir de son museau fouisseur à la recherche des fourmis porteuses de nutriments. Mais qu'attendez-vous donc pour sortir votre trompe, la dérouler pareillement à celle de l'éphémère papillon, avant de l 'enfouir dans les blanches corolles où le précieux nectar est toujours disponible ? Attendez-vous donc que le ciel vous tombe sur la tête ? Qu'il vous adresse son message de pluie, qu'il déplie chaque goutte translucide de sorte que, y trempant votre langue insoucieuse, soudainement se produise une illumination, un éblouissement papillaire, une juteuse révélation ? Attendez-vous ?

 

 "Dans quel parler tombe la pluie sur les villes de la douleur ?"

 

Ou bien, alors, serez-vous comme au bord de l'abîme, les yeux hagards, les mains moites, la gorge serrée, le sexe enfui dans quelque repli épidermique, tétanisé, n'existant qu'à titre de sursis, de projet nul et non avenu, de vice rédhibitoire qui vous porterait au bord des choses, juste le temps d'une éjaculation précoce et vous abandonnerait, les bras ballants dans quelque cul-de-basse-fosse livré à toutes les apories possibles et imaginables ? Est-ce de ceci dont vous avez peur ? Est-ce l'explication de votre stupeur, de vos tremblements ? Ou alors êtes-vous saisis d'un tel sentiment d'incomplétude que vous ne puissiez avancer dans l'existence qu'à titre paralytique ? Qu'à titre de mutité, d'occlusion de votre esprit face aux pulsations des choses, à leur insondable mystère, à leur réserve inépuisable de sens. Est-ce cela qui vous abandonne ainsi, pareil à l'orphelin au bord de la route, alors que passent les caravanes et que les chiens aboient à la Lune ? Est-ce cela ?

 

"Dans quel parler tombe la pluie sur les villes de la douleur ?"

 

  Oui, vous demeurez prostrés dans l'attitude d'une inutile concrétion tutoyant le ciel de sa démesure calcaire, et votre refuge n'est que la mise en forme de cette vérité qui nous dit, continuellement, en divers langages compréhensibles - il suffit de s'y disposer- que la pluie parle en effet, de moi, de vous, des bien lotis, des "damnés de la terre", car cette pluie n'est que la métaphore vive de la douleur qui, partout, lance ses ramures d'effroi, jusque dans la plus étroite doline, dans le moindre creux portant le monde à nos yeux étonnés qui ne s'ouvrent qu'à questionner, inlassablement, jusqu'au vertige !

 

 

 

 

 

 

 

  

 

 

 

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : ÉCRITURE & Cie
  • : Littérature - Philosophie - Art - Photographie - Nouvelles - Essais
  • Contact

Rechercher