« Ce que vous cherchez
vous cherche aussi »
Œuvre : Dongni Hou
***
Vous êtes là,
Dans la grande pièce
Aux murs bleus.
Vous êtes là,
En vous,
Écoutant votre rumeur simple,
La cherchant comme
Vous vous mettriez en quête
D’un objet rare,
Un incunable au maroquin fauve,
Une pièce d’argent portant l’effigie
De quelque héros
À vous seule destiné.
Nul n’habite ce lieu
Si ce n’est le silence.
Nul ne vous regarde
Que votre conscience.
Elle est le don
Qui vous a été remis
À votre naissance,
La boussole qui vous guide
Dans cet oublieux destin
Qui, parfois, menacerait
De vous laisser
Au bord du chemin.
Tout contre vos pieds,
La dalle de bois clair
Vous dit la grâce immédiate
De votre âge
Encore nubile.
Cambrée sur la pointe des pieds,
Afin de mieux découvrir l’horizon
Qui vous attend et vous requiert
Bien au-delà de vous,
Dont vous goûtez,
Par avance,
La douceur de soie,
Parfois le rugueux
Et l’incompréhensible douleur.
Tout, ici, est beau,
Qui chante l’inimitable
Souci d’exister.
C’est comme une onde
Qui vous traverse
Et vous dépose
Sur des rives inconnues.
Elle vous façonne à votre insu
Et vous en éprouvez
Le continuel écoulement,
Ce luxe à jamais.
Ce miroir doré est
Si mystérieux,
Il est votre double,
L’éternel reflet
Que vous tendez au monde.
Qu’y voyez-vous qui, jusqu’ici,
Aurait été dérobé à votre vue ?
Est-ce vous qui y paraissez
Ou bien votre ombre ?
Ou bien l’illusion
Qui vous sauve
Provisoirement
Du naufrage ?
Êtes-vous si orientée
Vers le passé
Qu’il vous réconforterait ?
Vous regardez la lumière levante
Comme si elle était le lieu
De votre propre naissance.
Auriez-vous peur de l’avenir,
Du tressage des jours
En leur singulière décision ?
Il y a ces miroirs en enfilade,
Ces représentations en abîme.
Vous vous en détournez de peur,
Sans doute,
D’y découvrir un message
Qui vous disconviendrait,
Qui vous dirait telle
Que vous ne souhaitez être
Regardée.
Connaissez-vous, au moins,
La pure élégance
De votre dénuement ?
Cet air de fuite qui se plaque
À votre corps
Dans la manière d’une fugue ?
Vous connaissez-vous,
Au moins,
Ou ne vivez-vous que
De pures illusions ?
Vous êtes si absente à vous
Dans le jour qui vient !
Peut-être êtes-vous éparse
À vous-même,
Dans l’inconnaissance
De votre être,
Égarée dans le flou
De quelque sentiment diffus ?
Savez-vous, au moins,
Les termes selon lesquels
On s’interroge à votre sujet ?
Les idées sont si lancinantes,
Elles jettent leur filin
Au plus profond de la nuit,
Taraudent les rêves,
Les exténuent sur le bord
D’un illisible rivage
Ce, à propos de quoi
Vous questionnez,
J’en devine le tremblement,
En ressens l’urgence.
Vous le savez en votre fond
Mais feignez d’en réduire la voilure
D’abattre le grand foc
Et de naviguer à l’estime.
Vous demeurez sur le bord
D’une VERITE
Et attendez qu’elle éclose
D’elle-même,
A l’aube de vos pensées.
Nulle VERITE ne peut être atteinte
Autre que partielle.
Un rapide brasillement,
La flamme perdue qui vacille,
Le saut capricieux d’un feu-follet,
Puis plus rien qu’une complainte,
Au loin,
Qui s’efface et meurt
Aux abords tranchants de la nuit.
Cette VERITE qui vous tourmente,
Vous la savez hors de vue.
L’appréhenderiez-vous
Et vous seriez
Dans l’incertitude même
De votre être.
Elle ne se dévoile jamais
Que lorsque nous atteignons
Notre totalité.
Autrement dit c’est notre mort
Qui nous la livre selon
L’offrande dernière
Qui clôture notre propre sens.
Demeurez donc
Dans cette attitude craintive
Aussi bien que naïve de celle
Qui vit en émoi d’elle-même
Et n’attend rien d’autre
Qu’une mélodie sans fin.
Elle se donne
Pour certitude infaillible.
« Ce que vous cherchez
vous cherche aussi »
VERITE ne vous trouve
Que partiellement accomplie,
Aussi il vous faut être
En progrès de vous,
Jusqu’à votre pointe
La plus avancée,
Pour lui appartenir.
Nul retour n’est envisageable.
Toujours le temps
Va de l’avant
Toujours !