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23 juin 2018 6 23 /06 /juin /2018 15:53
Cette assise bleue dans le ciel

 

Photographie : Alain Beauvois

 

 

***

 

 

 

Cette assise bleue dans le ciel

 

Elle était si vacante

Dans la brûlure de l’été

La foule était bigarrée

Les mouvements multiples

La houle au loin

Faisait ses blancs embruns

Les mouettes au ras de l’eau

Tressaient le poème du rien

Les nuages étaient légers

On eut dit des flocons de papier

Des mots voguant

Au plus loin d’eux-mêmes

 

*

 

Il y avait longtemps

Au creux de juillet

Sur ce reposoir d’azur

Ta forme s’était posée

Pareille à la brume

Qui tapisse les eaux

Aux confins de l’aube

Tu lisais je crois

Quelques vers

De Rainer Maria Rilke

J’en ai encore à l’oreille

Le rythme inépuisé

 

En mon visage un univers pénètre

Peut-être inhabité comme l’est une étoile

 

Ceci intranquille

J’en avais surpris les signes d’encre

Au-dessus de ton épaule

Cette dune indolente

Cette douceur d’amphore

Cette invitation au péché

Mais pourquoi donc

Cet alanguissement

Au plein du jour

Pourquoi cette solitude

Alors que l’heure était à son acmé

Les enfants joyeux

Jouaient au cerf-volant

Leurs queues de soie

Fouettant l’azur

Les couples jouaient

Au jeu de l’amour

Dans les chambres muettes

Que la lumière brunissait

 

*

 

Auprès de toi

Ma présence était si discrète

A peine un soupir

Que le vent du large aurait chassé

Nous n’avons dit mot

Le concert de nos solitudes

S’abîmait au loin

Dans d’étranges vertiges

Dont nous étions exclus

Il fallait être dans l’unique

N’en point sortir

Au risque de sombrer

Dans la mondaine vanité

 

*

 

Nous étions des êtres du silence

Des clavecins désaccordés

De métalliques destins

Que ne frappait plus

De marteau en quête

De quelque son

Le vide était notre lieu

Le peu nous sustentait

L’infime déposait en nous

La trace inapparente du temps

 

*

 

Qu’aurions-nous pu proférer

Qui n’eût altéré ce bonheur insu

Quel geste aurions-nous accompli

Qui nous eût remis au monde

Dans l’ennui sans issue

Dont sa matière est tissée

Mieux valait être soi

Dans l’enfermement du paraître

Mieux valait cette insularité

Qu’un inutile bavardage

Mieux valait ce mutisme

Il était garant de notre vérité

 

*

 

Cette assise bleue dans le ciel

 

J’en reprends possession à l’instant

Bien des années après

Sais-tu ton empreinte

Y est presque visible

Ton odeur iodée présente

La grâce de ton cou

Aussi réelle que la touffe de varech

Sur la nuée de roches noires

 

*

 

Es-tu seulement une décision

De ma mémoire

L’image inachevée

Trouvant aujourd’hui

Le lieu de sa fenaison

Parfois il faut un long temps

Avant que les choses ne s’ouvrent

Et parlent avec clarté

Le sublime est ceci

Qui se retient toujours

Dans la nervure du secret

 

*

 

Mais comment se fait-il

Ces feuillets que tu lisais

Les voici sur ce banc

Où s’éploie

La lointaine rumeur

De la mer

Ils viennent de si loin

Cependant ils sont si près

En aperçois-tu

Où que tu sois

Ce message hauturier

On dirait le ventre d’une goélette

Que borde la verte écume

On dirait le pieu du phare

Planté en plein ciel

Cette exclamation à jamais

Qui ne trouvera nulle réponse

 

Comme un qui voyagea sur des mers inconnues

J’erre parmi les sédentaires éternels

 

Oui le poète des poètes est là

Qui nous sauve du risque de périr

Sans même avoir entendu la beauté

Or ceci seulement est le glaive

De notre accomplissement

Ensuite nous pourrons mourir

Outre cet éternel voyage d’exil

Que demeure-t-il

Qui vaudrait la peine d’être vécu

Je te le demande muette présence

Cette assise bleue dans le ciel

Vide de toute dette à quoi que ce soit

Sera le mot ultime

Qui sera proféré

Le temps déjà  n’est plus

Qui s’enfuit à l’horizon

Loin l’horizon qui s’écarte

Des êtres de chair

Et nous ne connaissons même plus

Les frontières qui nous bordent

Tout est si flou

Qui plonge les yeux

Dans l’ombre

Une assise

Avons-nous une assise

 Au moins

 

*

 

 

 

 

 

 

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23 juin 2018 6 23 /06 /juin /2018 08:10
Le simple dans la venue du jour

Short story

100 x 70 Bristol

Barbara Kroll

 

 

***

 

 

 

Le simple dans la venue du jour

 

C’était le bleu de l’aube

Le bourgeon au printemps

La neige d’hiver

Les ors de l’automne

Une parole amie

Quelque part

Dans la gorge

D’un frais vallon

Une fête au village

La corde mauve

D’un ruisseau

Une pliure d’ombre

La cendre d’une rencontre

 

*

 

Souvent je me levais la nuit

Dans le froid lumineux

Avec les yeux des étoiles

Pour seuls témoins

Une luciole brillait au loin

Des amours se levaient

Des gestes se taisaient

Et rien ne paraissait

Que la langueur de l’heure

Et rien ne se disait

Que la beauté du monde

 

*

 

Souvent je t’ai surprise

A la margelle

De la fontaine

Seulement vêtue de nuit

Attentive à ne rien déranger

Qui aurait brisé

Cet infini cristal

Cet instant de métal

Cette nervure d’acier

Qui tenaient le ciel

Amplement ouvert

Qui tenaient le cœur

En son étrange suspens

 

*

 

A ma croisée

Accoudé dans l’attente de toi

Le temps n’avait plus cours

L’espace s’effilochait

Les rumeurs tarissaient

Le doute s’estompait

La vie souriait

De toutes ses dents blanches

Le muguet faisait

Son bruit de pervenche

Le cerf reposait

Au milieu de ses bois

Le paon éployait sa roue

Le lucane dormait

Dans sa cuirasse lustrée

Flamboyant renard

Enroulé sur sa pelisse

Feignait de somnoler

Mésanges fauvettes

Zinzinulaient

Les amants s’enlaçaient

Avant que le jour ne se lève

 

*

 

 Le simple dans la venue du jour

 

Je l’ai connu grâce à toi

Au buisson de tes cheveux

C’était un jais c’était une ardeur

Je l’ai connu à ton corps si blanc

Un nuage s’y est perdu

Je l’ai connu au feu de tes seins

Deux baies rouges à peine écloses

Et pourtant ils surveillaient l’ombre

De leur cruelle timidité

Le simple dans la venue du jour

Comment ne pas l’éprouver

Jusqu’à la graine de l’ombilic

Cette origine en attente

De son continuel ressourcement

Je l’ai connu à ta source vive

Cette nervure de ton sexe

Qui mordait ma chair

Dans la rubescente douleur

Connu encore dans l’albâtre de tes jambes

Sur l’éminence de tes chevilles

Sur les rubis de tes orteils

Connu en toi

Seulement en toi

Sagement assise

Sur la cerise rouge du désir

 

*

 

Le simple dans la venue du jour

 

Nulle part de plus belle volupté

Que cette sublime opalescence

Que ce corps de porcelaine

Ce regard de myosotis

Cette perle oubliée

Quelque part

Sur une feuille

De Bristol

De cela

De cette présence-absence

L’on peut mourir

Tel le héros

Au pied de sa déesse

Je meurs donc d’écrire

De te dire en mots

Le péché de chair est si doux

Dans le bleu de l’aube

Le bourgeon au printemps

La neige d’hiver

Les ors de l’automne

Il y a un violon

Loin là-bas

Qui joue en sourdine

Je crois bien qu’il s’agit

D’un adagio

Comment sortir de ceci

Autrement qu’à n’être plus

Qu’une larme

Sur le bord d’une paupière

Où ton regard

Où ta main

Où ton fruit

Qui me rendraient à moi

Où donc

 

*

 

 

 

 

 

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22 juin 2018 5 22 /06 /juin /2018 16:14
De Toi le manque absolu

Dornröschen

Belle au Bois Dormant

Œuvre : Barbara Kroll

 

***

 

 

De Toi le manque absolu

 

C’était toujours de cette manière

Là au plein de la nuit

L’heure de ta visitation

Je ne dormais que par intermittences

Peut-être par procuration

N’être présent au rendez-vous

Eût mutilé mon âme

Au plus profond

De son illisible matière

J’étais ici j’étais ailleurs

Ne savais plus le lieu de mon être

Divaguais pareil à l’esquif

Balloté au gré des flots

 

*

 

De Toi ne savais rien

Si ce n’est ce curieux nom de

Belle Dormante

Dont je ne puisais jamais

Que l’onirique forme

Cette faille dans l’ombre

Qui s’ouvre et palpite

Il me plaisait de t’imaginer

Sous les traits étranges

D’une anémone de mer

Présence pulsatile

Dont je ceignais

La douve étroite

De mon front

 

*

 

Te scrutant j’entendais

Au creux de l’intime

La belle légende

D’un charme mortel

A toi destiné

Ce fuseau qui piqua ton doigt

Te rendit éternelle

Jamais on n’oublie la grâce

D’un conte

Jamais de la félicité du rêve

On ne fait son deuil

Présente tu l’étais plus

Qu’étincelle sur la crête des vagues

Qu’oiseau dans sa dérive céleste

Que libellule sur le miroir de l’eau

 

*

 

Il fallait à mon contentement

Cette fuite à jamais

Cette feuillure

Dans la perte du jour

Cette lumière qui s’éteignait

Dans le ressac du crépuscule

L’inverse d’un bourgeonnement

Le pli d’un recueil

 

*

 

De Toi le manque absolu

 

Ce qui se dessinait

A l’horizon de mes désirs

Etait toujours en fuite de soi

Des jambes d’ébène

Que la couleur épuisait

La chute d’une robe

Tel un blanc calice

Telle une écume

A la bordée du jour

Et tes bras ces lianes

Qui n’étaient effusives

Qu’à l’aune d’un impossible

Saisissement

Mais de quoi donc

D’une vérité verticale

D’un bonheur passager

D’une joie faisant son feu

Là au rivage de tes nuits

 

*

 

Quelle était donc la flèche

De ton destin

Quelle la poésie dont tu tressais

Ton énigmatique visage

Nulle épiphanie qui eût pu proférer

La goutte oblongue de tes yeux

La braise douce de tes pommettes

Tes lèvres que je projetais purpurines

Cette fossette au menton

Qui t’eût identifiée entre mille

 

*

 

De Toi le manque absolu

 

C’était bien ceci

Cette pièce anonyme

Où tu te dressais

La matité silencieuse des murs

Un plafond de verre

Qui te retenait captive

Et ce tourbillon rubescent

Ce volubilis de sang

Qui perlait ses gouttes amnésiques

Sans doute étais-tu sans mémoire

Perdue dans le corridor

De desseins inachevés

Ce flottement te rendait irréelle

Ces lignes baroques

Dont tu vêtais ton mystère

Emplissaient mon manque de toi

De la dague délicieuse du vertige

Puisses-tu demeurer sans demeure

Puisses-tu ne jamais prendre visage

Puisses-tu encore une fois

Piquer ton doigt au fuseau ténébreux

Alors je ne sais

Ce qui adviendra de toi

Ce que sera le cours

De mon existence

Flux et reflux sont si forts

Qui nous éloignent de nous

 

*

 

Où les chimériques rivages

Où nous pourrions habiter

Dans l’union passagère des cœurs

Il est si facile de s’égarer

En ces temps de confusion

Mais l’insu est un délice

Auquel toujours nous voulons

Nous abreuver

Nos lèvres sont sèches

Notre gorge en feu

Rebelles

Indociles

Nous voulons

L’Absolu

Nous voulons

Le Rien

Sans doute

Ne le savons-nous pas

 

*

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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19 juin 2018 2 19 /06 /juin /2018 09:18
Ce chemin dans la chair

                     Photographie : Blanc-Seing

 

 

***

 

 

Ce chemin dans la chair

Dont nous pensions

Qu’il nous sauverait de nous

Sans doute l’avions-nous

Trop emprunté

Au gré de nos passions

Au feu de nos instincts

Il était inscrit en nous

De toute éternité

Car nul n’échappe

 À la mesure humaine

De ses pas

 

*

 

De Toi tu n’avais emporté

Que le deuil de ta séparation

Pour Moi la solitude à jamais

Avec ses ailes de carton

 

*

 

Sur du mouvant

Nous nous étions assemblés

Telles les feuilles qui filent

Au ras de l’eau

 À leur perte prochaine

Nous étions deux courants

Que rien ne rapprocherait

Tu étais trop lointaine

J’étais bien trop en souci

De mon être

Qu’attend-on

Si ce n’est d’arriver à soi

D’y parvenir jamais

 

*

 

Nous étions pareils

A Simon du Désert

En proie au doute éternel

En quête d’absolu

J’errais parmi les dunes

Le silence était grand

L’ombre des barkhanes

Faisait ses sombres croissants

Au creux des nuits que ne visitaient

Ni Lune ni Etoiles

Ciel d’encre dans lequel

Nous dérivions

Orphelins de rêves

Erratiques figures

 

*

 

Le matin nous trouvait hagards

Les mains tournées au ciel

Les paumes ruisselantes de vide

Les doigts englués d’aube

Nous avions toutes les peines

A nous hisser hors le pli

De nos cauchemars

Chrysalides empêtrées

Dans cette soie qui aurait dû

Nous être douce

Elle n’était que parois

De notre commune geôle

Nous étions ermites

En nos blanches méditations

Nous étions ascètes

Perdus dans le labyrinthe

D’un morne ennui

Et le Diable soufflait

En nos âmes

La complainte du chagrin

 

*

 

Ce pays des Hauts Vents

Hors toute raison

Hors toute présence

Hameau déserté des Vivants

Nous l’avions choisi

D’un commun accord

Pensant que ce lieu vide

Serait le premier mot

D’une phrase que nous dirions

Le premier jour d’un poème

L’existence était en prose

Les heures de plomb

 

*

 

Nous passions un long temps

A regarder au travers des vitres

Que le dépoli froissait

Les troupeaux que conduisaient

Les bergers

Nous nous usions

A lire Cioran ou bien Unamuno

Le tragique ornait nos fronts

Les pleurs lissaient nos yeux

La mélancolie tissait nos âmes

Des fils infinis d’une invisible toile

 

*

 

Sans doute pour des Etrangers

Aurions-nous été transparents

Tels des phalènes au crépuscule

Qui meurent sans le savoir

Jour et nuit étaient du même goût

Une amande sans saveur

Habitait nos palais

Une amertume creusait

Son vertige

 

*

 

Parfois nous allions sur ces collines

Teintées d’argile claire

Sur ces crêtes prises de vent

Que n’habitaient que

De maigres genévriers

Que ne troublait

Que le vol des sauterelles

 

*

 

Parfois le calvaire de fer

Tout en haut de son pain de sucre

Nous voyait corps unis

Corps soudés

Il était le météore

Auquel nous confiions

La juste mesure

De notre égarement

La Mer tout au loin

Se laissait apercevoir

Dans un moutonnement bleu

Qui ne manquait de nous étonner

Existait-il encore quelque chose

Qui eût du sens en quelque endroit

Du Monde

Quelque chose qui proférât

En dehors d’une affliction originelle

 

*

 

Ce chemin dans la chair

Que nous avions inclus

Dans la dague ouverte

De nos corps

Cette  chair repue

Aurait-elle connu

L’instant d’une courte extase

L’éclair d’un possible bonheur

Mais après ces brèves étreintes

Qu’en était-il

De nos vies qui ne soit inutile

La chair est triste hélas

Et j’ai lu tous les livres

disait le Poète Mallarmé

Fuir  là-bas fuir

 

*

 

Que fuir sinon son être

Qui est toujours en avant de soi

En arrière de soi

Il est si difficile

De coïncider

Avec soi

De faire unité

Avec sa propre chair

De demeurer

Dans la brume infinie

Qui nous fige

Ici

Et nulle part

Ailleurs

 

*

 

D’un chemin hors la chair

Nous exilant

De nos tourments

Serions-nous à nous-mêmes

Advenus

Rien n’était moins sûr

Jamais les Hauts Vents

Ne cessaient de souffler

Ici

Dans la courbure

Du jour

Jamais

 

*

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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11 juin 2018 1 11 /06 /juin /2018 08:53
Qu’est-il ici occulté

        Œuvre : Marcel Dupertuis

 

 

***

 

[Cette poésie se donne à comprendre

en tant que tentative orphique

de  saisie du Rien]

 

*

 

On regarde et on ne voit pas

 

On interroge et cela se ferme

Cela résiste et se cabre

Cela se réfugie dans la pureté

Du non-dit

Cela oblitère le sens

 La logique s’insurge

 La raison vitupère

Le langage s’aphasie

Les mots se révulsent

Et ne connaissent plus la forme

De leur usage

 

*

 

La forme s’informe

Se déforme

Se réduit à l’informel

Pareil au cristal

Qui vibre de l’intérieur

Et ne livre du secret

De son chiffre

Qu’un insoutenable éclat

 

*

 

On regarde et on ne voit pas

 

Il faut limiter la puissance des yeux

Il faut la fente de la myose

Juste un rai qui frappe la pupille

Un regard félin

 D’abord on voit une impossibilité

Que faire de cet affrontement

Qui ne soit jeu gratuit

Anneau girant sur lui-même

Enonciation vide

Chute

 

*

 

Ainsi se donne la folie

Qui mêle les formes

 Du réel

De l’imaginaire

 De Soi

Le dehors s’écoule

Dans le dedans

Le dedans plonge à même

Le dehors

Où la limite 

Où le moi en sa glaise durcie 

Où le réel en son silex tranchant 

Où la rencontre des deux

Où rugit le vent

De la démence

 

*

 

Le Rouge percute le Noir

Le Rouge expulse le Noir

Le Noir macule le Rouge

 Macula de la vision

Le Noir veut broyer le regard

L’aliéner dans sa plus profonde

Dimension

Car voir serait offenser

Ce qui toujours

Veut se dissimuler

Et pourtant se montre

Mais à bas bruit

Sous la ligne d’horizon

De la conscience

Sous les cils vibratiles

De l’esprit

 

*

 

On regarde et on ne voit pas

 

Mais au juste faut-il VOIR 

Faut-il entendre

Faut-il même espérer

Il faut se faire anti-Rimbaud

Se faire NON-VOYANT

Glisser sous la lame du réel

Briser les mots du poème

Il faut se faire Matière

NOIRE

ROUGE

S’éprouver en tant que taches

Sur l’aire immense de la toile

Là où le combat a lieu

Noir blessé jusqu’au sang

Ecume rubescente

Qui emporte la nuit

Au plein de son incandescence

Forges qui hurlent

Les loups sont entrés dans Paris

Noires les croix

Rouges les plaies

 

*

 

Lumière haute dans le ciel

Incendie zénithal

Œil bouillant verse

Ses scories

Arène Noire

Noire de monde

Rouge de passion

Pouces baissés

Foule exulte

Poussière vole

Poitrines hurlent

Acier a frappé

Garrot mutilé

Fleuve de sang

Robe de suie

Nuit de mort

 

*

 

On regarde et on ne voit pas

 

De l’infime myose

Il faut basculer

A la vertigineuse mydriase

S’ouvrent les abîmes

Par où marcher

Sur le bord des choses

Au risque de les comprendre

Et d’en mourir

Jamais œuvre ne nous est donnée

D’emblée

Jamais Aimée remise

Dans son écrin

Jamais Art à portée

De la main

Apporter quelque chose

Au-dedans de soi

Dans la Vérité

Est entailler le derme

Y verser l’acide

De la question

Ouvrir les portes

De Corne et d’Ivoire

Au gré desquelles Nerval

Connut le songe

Et la Folie qui y était logée

Comme le ver dans le fruit

 

*

 

Du NOIR il faut faire

Quelque chose

Rime à l’Initiale seulement

Nuit

Néant

Nul

Négation

Il est du destin de [N] de Néantiser

D’énoncer le Non

D’ouvrir la Nasse

Par laquelle le Rien s’annoncera

A la finale

Ce [R] uvulaiRe

Rocailleux

EchaRde

Comme ultime décision

Du mot

Roc de Sisyphe en surplomb

De l’Être

 

*

 

Dans le NOIR

C’est la NUIT qui veille

Coefficient d’ombre

A jamais imprenable

Dans la NUIT gît le NU

Que l’I pointe

Que le T observe

Du haut de sa potence

Tel Villon pendu

Clamant son épitaphe

Aux Frères humains

 

*

 

NOIR-NUIT

Dans leur dénuement

Le plus tragique

S’immolent dans la rivière pourpre

Des passions

Aurores de feu et d’incarnat

Teintées du sang des victimes

Que nous dites-vous

Qu’on regarde et ne voit pas

L’amour en son éclat

L’art en sa cimaise

L’être en son énigme

 

*

 

Nous sommes si démunis

Et de crier

Du Rouge au Noir

Du désir au deuil

Nos lèvres sont lassées

Vienne l’heure de Minuit

L’heure de l’entre-deux

Encore temps pour nous

De demeurer à la limite

Du Noir Hadès

Du Rouge Enfer

Ils sont le même

Et nos mains ne griffent

Que le Rien

Le Rouge

Le Noir

Le Rien

 

*

 

Que pourraient-elles faire

D’autre

Que griffer

Et griffer encore

Muets sont les signes

Plurielles les lignes

Perdues les couleurs

En leur insondable

Douleur

 

*

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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6 mai 2018 7 06 /05 /mai /2018 08:49
De pierre et de chair

                          « Gradiva »

                        André Masson

                    Source : Wiki Home

 

***

 

 

Ô toi que j’ai cherchée

Parmi la pierre des musées

As-tu au moins deviné

L’étrange mélopée

Qui depuis mon obscurité

M’a longuement habité

 

*

 

Guère de jour

Sans que ton ombre

Ne rôde autour de moi

Comme ces nuées de mouches

Qui le soir

Dans l’or du couchant

Vibrionnent au plein

De leur funèbre chant

 

*

 

Tu es si belle

Toi que la pourpre envahit

Meute de sang qui fait ton siège

Tu sauras bien y résister

Ton sourire si altier

Y posera le sceau

De sa royauté

*

 

Sais-tu que tu hantes

Ma mémoire

Que mes heures

Sont longues à mourir

Que de toi je ne puis faire

Le deuil

Comment renoncer à te saisir

Sans trahir

Mon orgueil

Sans faire de mon corps

Un sombre tombeau

Sans faire de ma peau

Un livide linceul

 

*

 

Seul oui je suis seul

Et le demeurerai

Tant que mon tumulte de chair

N’aura rejoint le seuil

De ton antique cité

J’ai pensant à toi

 Âge de pierre

J’ai pensant à toi

Fatigue de Mathusalem

Croulant sous le poids

De vils anathèmes

 

 

*

 

Puisses-tu un jour

Sortir de ton sépulcre de pierre

Donner à mon incestueux amour

Les armes de la guerre

Toi que Mars désigne

Comme son double insigne

Tu es tout à la fois

Ma Mère

Ma Fille

Celle par qui j’erre

Au hasard des chemins

Celle qui guide les pas

De mon amer destin

 

*

 

Quel mystère portes-tu

En toi Gradiva

Quel est donc ton secret

Cette marche en avant

Qui n’aurait de durée

Que le temps

D’une question

Sans doute

Du plus faible intérêt

Je ne suis qu’un affligé

Archéologue

Qu’un illuminé privé

De sa drogue

 

*

 

Tu n’auras pas le cœur

Moi qui viens à Pompéi

Au péril de ma vie

De m’abandonner

À cette fureur

De ne point te connaître

Seulement ton sosie

Qui au hasard des rues

Ouvre la fenêtre

D’une possible ardeur

Mais déjà entachée

D’oubli

 

*

 

N’auras-tu été

L’espace d’une visite

Que cette blancheur

De calcite

Que ce bas-relief

Inscrit au fronton

De ma sombre nef

Que ce bourdon

Sonnant à la cimaise

De mon front

Il est de braise

Comme un affront

Qui jamais ne sera lavé

 

*

 

Parle au moins parle Gradiva

Que le son de ta voix

Soit le suaire

Qui fera de moi

Ton scapulaire

Car à ton cou

Il ne saurait y avoir

D’autre camée

Que ce souci

Antiquaire

Que cette affliction

Reliquaire

 

*

 

 

 

 

 

 

 

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5 mai 2018 6 05 /05 /mai /2018 08:05
Blonde vision

                Photographie : Blanc-Seing

 

 

***

 

 

 

Parfois les hommes

 

Dans leurs rêves de soie

Et d’organdi

Voient ce que

Depuis longtemps

Ils attendaient

Dans un nuage de joie

L’amour en son éclat

Cette étrange beauté

Ils n’en peuvent douter

Est venue tout juste

Pour eux

Leur apporter le muguet

De son feu

Heureux ils le sont

Plus qu’un adolescent

En son destin innocent

 

*

 

Parfois les hommes

 

Du fond de leur sommeil

Tendent vers l’avant

Leurs mains

Aux ongles vermeils

Essaient de happer

La moindre parcelle

De félicité

Ici le sourire éclatant

D’une Belle

Là la promesse

D’un avenir radieux

Un vent léger

Sur des lèvres carminées

Le doux clignement

D’une paupière

Le feu assourdi

D’un khôl

Le désir planté

Au fond d’une pupille

A ce jeu puéril

Ils gaspillent

Le peu qu’il leur reste

De vie

 

*

 

Les jours sont si pressés

Qui font leurs forêts

D’hirsutes brigadiers

Leurs sombres emmêlements

Leurs buissons

Aux éclairs si ardents

 

*

 

Parfois les hommes

 

Dans l’étrange remuement

De leurs âmes

Sont pris de tremblement

Et le  bruit d’une lame

Venue du plus loin de l’espoir

Un triste soir

Brûle telle une flamme

 

*

 

La douleur

Ils n’en sentent pas

La profondeur

Ils sont bien au-delà

Dans l’insondable rumeur

Des consciences perdues

D’eux-mêmes

Ils sont exclus

D’eux-mêmes

Ils n’osent plus

Hanter les sombres couloirs

Visiter les inutiles reposoirs

Tant désertés ils sont

De tout espoir

 

*

 

Leur vue est

Si basse

Que dans le tain du miroir

Ils n’aperçoivent

De guerre lasse

Que le tout dernier éclat

De leur histoire

Leur existence si longue

Qui s’étend d’un horizon

 À l’autre

Paraîtrait bien dérisoire

A qui voudrait tenter

D’en déchiffrer

Le cours en forme

De périssoire

Leur navigation

Plus qu’illusoire

Ils en cherchent fiévreusement

La trace pareille à un  onguent

Dont ils voudraient vêtir

La herse de leurs jours

Avant que le mal définitif

Ne les atteigne

Sur le frêle esquif

La coquille de noix

Qui vogue vers le Styx

Avec sa voile en forme de croix

 

*

 

Parfois les hommes

 

Sur le drap blanc

De leur sclérotique

Tels des héros tragiques

Revenant au foyer

Après maints périples

Reniés par leurs anciens disciples

Pris d’une soif inextinguible

Projettent sur la toile

De leurs fantasmes

Quantité de belles âmes

Foultitude de jolies dames

Tout ceci pour du beurre

Car tout ceci n’est qu’un leurre

Une habile fantasmagorie

Une sombre supercherie

 

*

 

Parfois les hommes

 

Rêvent debout

Et tant mieux

Plutôt rêver

Que de croire

À la réalité

A la Ré-a-li-té

 

*

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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4 mai 2018 5 04 /05 /mai /2018 08:25
 Ils avançaient les hommes

                " Paysage avec arbres "

                Patrick Geffroy Yorffeg

                  ( Technique mixte )

 

 

***

 

 

Ils avançaient les hommes

 

Dans l’effroi d’eux-mêmes

Ils avançaient et leurs mains

 Étaient des serres

Que la lumière ne connaissait pas

Ils n’avaient d’horizon

Que leur peau

Ils ne voyaient

Que les globes

De leurs yeux

Ne sentaient que les paumes

De leurs mains

Partout était la terreur

Qui lançait ses flammes

Partout le vertige

Qui déployait ses lianes

 

*

 

Le chemin était long

Qui partait de la ruche

De leur corps

Revenait à leur socle

De chair

Avec les plis serrés

De la haine

Tantôt ils s’abreuvaient

De mots usés

Tantôt s’essayaient

À la station debout

La terre était noire

Et de lourd bitume

Qui recevait l’abîme

De leurs génuflexions

 

*

 

Partout étaient les guerres

Les jets d’aveuglant napalm

Les sifflements d’obus

La déflagration des tympans

Ils voyaient rouge

Les hommes

Le ciel s’embrasait

Les arbres-torches

Lançaient vers le ciel

La supplique

 De leurs frondaisons

Tragiques

 

*

 

Crucifiés les hommes

Pour la gloire

De quelques uns

Des Importants

Dingues à lier

Au loin étaient

Les casemates de verre

Où le pouvoir semait

Son vent de démence

Les couloirs feutrés

Où la mort se levait

Désignait ses innocentes

Victimes

Peu importait la couleur

Pourvu qu’on possédât

L’ivresse

 

*

 

Ils avançaient les hommes

 

Hagards

Perdus

Ne se possédant plus

Comment être à soi

Sous le régime

De la terreur plénière

Comment connaître

Son frère

Au visage creusé

Par tant d’obliques desseins

Comment être hommes

Alors que l’humanité

Est terrassée

Opprimée

Réduite aux acquêts

Si humbles

Si parcimonieux

À peine s’ils se donnent

À voir

Une simple lisière

Aux contours de l’être

 

*

 

Un jour un vent se lèvera

Qui dira aux hommes

 

La folie d’exister

De tuer ses frères

De n’avoir pour viatique

Qu’une inique moraline

Non une éthique

Qui les guiderait en raison

De ne thérauriser que de l’avoir

Une estime de SOI

Uniquement de SOI

De son EGO poli comme

Un bronze

 

*

 

Un jour un vent se lèvera

Qui dira aux hommes

 

Le refus de l’Autre

L’appât du gain

La recherche du brillant

Le refuge derrière l’ostentatoire

Tout cela qu’il faudra biffer

Gommer jusqu’au Rien

Broyer jusqu’au noir

 

*

 

Il faut beaucoup de sagesse

Il faut beaucoup d’humilité

Pour construire une humanité

Il faut se dessaisir de soi

Se porter au-devant

De son être

Voir avec les yeux de

Qui-n’est-pas-Soi

Du Pauvre

Du Déshérité

Du Laissé-sur-le-bord-du-chemin

 

*

 

Beaucoup de trains passent

Dont plus d’un ne voient

 Que les signaux rouges

Un sillage dans le temps

Une perte au fin fond

De l’espace glacial

Sidéral

Minéral

De l’espace qui boit

La vrille de l’espoir

La réduit à néant

 

*

 

Il faut beaucoup de temps

Beaucoup de patience

Pour faire un homme

UN VRAI

 

*

 

Ils avançaient les hommes

 

Sous le ciel d’airain

Sous le ciel incendié

Où les arbres-torches brûlaient

Où le chemin de goudron

S’enfonçait

Dans la nuit du monde

Dans la nuit

Furibonde

Du monde

 

*

 

Ce qu’il fallait faire

Ecrire le long poème

De l’insurrection

Le jeter aux flammes

Ignition des mots

SEULE ressource

De l’homme

Alors rien ne pouvait paraître

Hormis l’abîme

De la désolation

Peut-être les Erratiques présences

Comprendraient-elles

Enfin

L’immense dette qui était la leur

Reconstruire Babel

Faire se dresser

Les Menhirs de chair

Assez de reptations

Assez de lignes basses

Fuyant à l’horizon

Assez de perditions

 

*

 

Ils avançaient les hommes

 

Leurs yeux cloués de cécité

Leurs mains amputées

Pieds rivés au sol

 

Ils avançaient

 

*

 

 

 

 

  

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30 mars 2018 5 30 /03 /mars /2018 08:34
De la pierre à l’eau

                  Photographie : Blanc-Seing

 

***

 

C’était un homme qui errait

Immensément

Au bord de soi

Dans l’immédiate distraction

De tout ce qui venait à lui

 

Ici sur le dur rocher

Là dans cette faille d’eau

Ici dans la fermeté de l’être

Là dans la dissolution des formes

 

Traçait sa voie

 Hors des sentiers battus

Chantait le matin

Face au vent

Se couchait la nuit

Sous le frisson

Des étoiles

 

Qu’avait-il à dire

À la face du monde

Qui soit autre

Qu’une plainte

De l’âme

 

Car l’âme est toujours

En dette de soi

Car l’âme cherche

Son propre contour

Et jamais ne le trouve

 

Chemineau il était

Qui longeait

La douce mélancolie

Des marcheurs

De-ci de-là

Les êtres les autres

Il en devinait la présence

Mais assourdie

Mais lointaine

 

Des voix qui se perdaient

Dans l’ombre des collines

Et des frais vallons

Tout en haut

De la canopée

Du ciel

 

Parfois mettant ses mains

En cornet

Il poussait un long cri

Silencieux

Le cri ricochait

Sur la pierre

Le cri chutait

Dans l’eau

 

Chemineau Chemineau

Répétait l’écho

De sa voix de roche

De son friselis de pluie

Et rien ne venait

Et solitude frappait

La peau de ses tympans

Enclume marteau disant

La désespérance du son

Dont nulle paroi

Ne relevait

Le dire

 

Un jour de grand vent

Un jour de grand froid

Dans l’heure neigeuse

Chemineau s’est allongé

Tout contre l’eau

Tout contre la pierre

Qu’il essayait de réchauffer

Du souffle de son corps

 

La pierre a tressailli

S’est levée tel le menhir

L’eau s’est dilatée tel le lac

S’est agrandie

De milliers de gouttes

Tous la pierre l’eau

Plus vivants que la ruche

 

Chemineau s’est étréci

À la taille de la modestie

Qui le vêtait de son étole

Depuis si longtemps

Qu’elle était

Une seconde peau

 

Nul n’a été alerté

De cette vie

En sa mortelle blessure

Nul ne connaissait

Chemineau

Seule la Mort s’est invitée

Au festin

Ici sur le bord

De la pierre

Là près du reflet

De l’eau

 

Chemineau

Chemineau

Répétait l’écho

Nul autre que l’écho

N’en percevait

L’ultime cantilène

 

Seule Dame à la Faux

Moissonna la tête de l’absent

Qui arrivé sur la pointe des pieds

Repartait sans laisser de trace aucune

Sauf dans l’escarcelle de la Mort

L’escarcelle

De la

Mort

 

En bas dans la vallée

Au sein des villes

Les hommes dormaient

Serrant leurs poings

Sur des rêves tout chauds

Rêvaient aux pierres

Rêvaient à l’eu

Nullement à Chemineau

Comment l’auraient-ils pu

Puisqu’il n’existait plus

 

 

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19 mars 2018 1 19 /03 /mars /2018 13:59
Je t’avais dit ces formes

    Photographie : Gilles Jucla

 

 

 

***

 

 

Je t’avais dit ces formes

 

Tu le savais

Qui m’obsédaient

Elles venaient la nuit

Pareilles à des symptômes

A de circulaires présences

Étaient-elles plus que cela

De réelles réalités

De féminines figures

Surgies au plein

De ma conscience

De possibles amantes

Taraudant mon corps

De la dague du désir

Avant que ne surgisse

Le plaisir en

Ses étonnantes banderilles

 

*

 

Partout cela fusait

Partout cela s’allumait

Longs feux de Bengale

Qui électrisaient mon dos

Lançaient dans les reins

Leurs meutes de folie

 

*

 

Je t’avais dit ces formes

 

Tu le savais

Qui m’inquiétaient

Peut-être l’ordinaire folie

Son pieu planté dans le derme

Et aucune manière d’en sortir

Autrement qu’à les halluciner

A nouveau

A les métamorphoser

En ce qu’elles n’étaient pas

De pures illusions

De simples images

Suspendues

À la margelle de mon front

 

*

 

J’en entendais le bruit

De source lointaine

Percevais la vacuité

D’une origine

Loin très loin

Au-delà des battements

Amniotiques

Dans un pli du Temps

Encore inaccompli

Dans un espace sans lieu

Dans un destin sans esquisse

 

*

 

Je t’avais dit ces formes

 

Tu le savais

Qui foraient mon âme

Jusqu’en son tréfonds

Peut-on jamais saisir

Le nu de ses phantasmes

Cette résille arachnéenne

Dont jamais on ne fait

Se rejoindre les fils

Vois-tu il y a tellement

De brume dense à l’aplomb

Des yeux

Un mur de cataracte

Et l’on ne voit plus

Qu’une image de soi

Recouverte

D’une taie d’oubli

Car le sais-tu

Vivre c’est d’abord

S’oublier

Eviter le jeu

De la fascination

L’EGO est ce danger

Qui toujours nous guette

 

*

 

Voyant ces sublimes rochers

Sans doute des blocs de granit

Ils s’ombrent d’une vaste solitude

Ils meurent dans le noir

Ils sombrent dans le gris

Nullement à l’aune

D’une volonté qui

Leur serait propre

Même la pierre de Sisyphe

Est sous le sceau des dieux

Seulement le silence porté

De nos propres errances

 

*

 

Que seraient donc

Ces diluviennes présences

Si nous ne les regardions

Avec l’œil du conquérant

Nous qui sommes les Bien-Nés

Parmi l’ensemble de la Création

Etaient-elles des symboles

Des puissances

Un élan dans le Ciel

Une poussée de la Terre

Qui n’auraient concouru

Qu’à notre éphémère gloire

Car je te l’avoue

Je me sens si petit

Et ces formes me disent

Ma finitude

A l’aune de leur éternité

Comprends-tu

Nous passons

Et elles demeurent

Entends-tu au moins ceci

Elles demeurent

 

*

 

 

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