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3 août 2013 6 03 /08 /août /2013 07:43

 

Les couleurs du fondement. (8° Partie)

 

 

 

 

  GRISE la question de la Métaphysique.

 

 

 Mais nous ne saurions conclure ce tour d'horizon en direction de la compréhension des significations sans faire référence au problème qui traverse toutes ces tentatives et en constitue les fondements. A savoir la question essentielle formulée par Leibniz en 1740, sur laquelle repose l'édification de la Métaphysique :

 

"Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?"

 

 

  Poser la question n'est certainement pas la résoudre. Mais, tout de même, comment pourrait-on éviter de l'aborder ? Et, ici, sans doute rejoignons-nous notre attitude du tout jeune enfant, lorsque découvrant la possibilité de la Mort et, corollairement, l'inquiétude viscérale dont elle porte l'ombre, plonge, irrémédiablement, dans une angoisse constitutive, laquelle déterminera l'essence de notre propre finitude humaine. Et, ici, identiquement, sommes-nous reconduits à l'orée de notre adolescence, peut-être au seuil du jour, alors que les choses s'abîment dans une manière d'ambiguïté, d'illisibilité et que, soudain, le fait d'ÊTRE devient tellement ténu, irreprésentable, que surgit l'idée du RIEN, du NEANT et, sans même le savoir, notre corps, notre esprit deviennent les lieux géométriques, le point focal où la Question fait ses cruelles mais indispensables interrogations. C'est de notre propre vision, de notre compréhension intime du monde dont il s'agit. Comme un cercle herméneutique sans fin, une fuite vers l'avant, cernée de mortelles obsessions, attendant seulement, qu'un jour, l'existence sur son ultime déclin nous en livre, peut-être, l'explication. Bien évidemment, nul doute que s'origine, à partir d'une telle requête, les instances essentielles de la Métaphysique. Les racines sont plantées dans le sol inquiet, l'arbre se déploiera, fera ses feuillaisons sans, pour autant, que les assises terrestres, chtoniennes, ombreuses soient, un seul instant oubliées.

  Que Leibniz, en son temps, ait fait intervenir l'Être suprême, à savoir Dieu, de façon à clore provisoirement le débat n'a rien de vraiment étonnant. La Cause première apporte bien des apaisements lorsque l'âme est troublée. Il s'agissait, tout simplement, de la reprise de la conception d'Aristote. Comme quoi l'histoire des idées ne demandait qu'à être reconduite. Mais, quelles que soient les perspectives adoptées, qu'il s'agisse d'une assise religieuse, spirituelle, profane, matérialiste, idéaliste, le problème fondamental n'en est pas moins posé, qui continue son évolution en sourdine, à bas bruit. Qui jette la Métaphysique par la porte peut, à tout moment, s'attendre à la voir se manifester par la fenêtre. Ne se débarrasse pas des concepts fondamentaux qui veut !

  Bien évidemment, cette question posée de cette manière presque indigente, pourrait paraître naïve et, sans doute, bien inopportune aux esprits épris d'une interprétation toute matérielle du monde. Car, pourquoi se poser la question dès l'instant où de l'étant nous est fourni à portée de la main et où son existence ne semble pas pouvoir être remise en question ? Mais le registre des évidences est souvent étroit et il faut donc aller y voir de plus près. Car, tout aussi bien, le Néant aurait pu être la seule forme de "manifestation" à laquelle l'être aurait pu consentir depuis sa constante énigme. Mais l'être-présent aussi bien que le Néant-imaginé demeurent deux hypothèses dont les équations sont identiquement difficiles à mettre en scène. Nous en sommes réduits au domaine des conjectures. Et tant mieux.

  Ainsi sont créées les conditions par lesquelles nous ne cesserons de convoquer l'étonnement philosophique, seul à même de nous porter au-delà de nous-mêmes, vers notre propre compréhension humaine d'abord, vers la saisie du monde ensuite. Nous aurions pu nous contenter de vivre, c'et-à-dire de ne considérer que le fonctionnement de nos mécanismes biologiques, nos assises basales, nos métabolismes élémentaires, nos destinées d'amibes. Mais, dès l'instant où s'introduit la question du pourquoi, alors nous ne sommes plus en repos, alors nous ouvrons grandes les portes de la sémantique existentielle alors que, jusqu'alors, ne s'étaient présentées à nous que des suites lexicales isolées, comme autant de mots sans lien les uns avec les autres.

  Le Pourquoi est de telle nature qu'il métamorphose aussitôt ce que la vie lui présentait à la façon d'une évidence en préoccupation de tous les instants, en thèse réellement existentielle. Cherchant, par cette question même, à nous extraire de ce Néant qui nous provoque, nous nous appuyons sur les bases dont la vie nous fait le don afin, par ce seul exhaussement, d'élaborer la question, c'est-à-dire donner du SENS à ce qui ne saurait en avoir. Le trajet accompli est celui-là même de la Philosophie qui, voulant se libérer de l'impensable, a recours à la seule question fondant l'existence et qui est celle de l'énigme de l'être dont l'équivalent pourrait être l'énigme d'exister. Car exister, c'est être. Alors que vivre n'en constitue que les prolégomènes, les conditions de possibilité d'une apparition.

  La vie, dans sa profusion, prend souvent l'apparence du chaos. Si rien n'est organisé, le vivant se rebelle et devient illisible, à la façon du tableau de Giorgio de Chirico où tout est soumis au registre de la schizophrénie (donc de la perte du sens). Si tout est organisé, ordonné par le langage, la raison, le logos en tant que question, tout redevient pensable, hypothèse progressant vers une thèse éclairée-éclairante du monde en tant que cosmos. Le cosmos étant un autre mot pour dire la compréhension, le sens

  Nul doute que la question de Leibniz soit  une question fondamentale. La posant de cette manière dont on pourrait penser qu'elle résulte davantage d'un jeu de cour d'école que d'un esprit de rationalité, nous percevons, aussitôt, sous l'apparente candeur, l'abîme de réflexion. Car, élaborer la question qui met en perspective l'énigme de l'être, ne saurait résulter d'un simple passe-temps, comme l'on jouerait au cricket. Encore que tout jeu suppose une prise de risque et une situation face à de l'inconnu. A éluder une telle question, pour autant, nous ne l'évacuons pas. Si nous faisons mine de nous en absenter, aussitôt, surgit à sa place une autre question faisant sa mortelle giration: qu'en est-il du Néant ? Comme un jeu infini de bascule où il s'agit de l'être ou bien du non-être. Chaque question portant en soi son immense charge de mystère, d'inquiétude. Car, comment envisager l'être, cette pure abstraction sans être saisi de vertige ? Car, comment habiller le Néant d'une silhouette qui ne nous effraie point ? C'est toute la dimension de notre vision du monde sous son angle Métaphysique qui court sous de telles projections. Disant cela, la vie, l'existence, la Mort, le Néant, nous ne faisons que répéter l'éternelle antienne dont nous ne saurions nous libérer qu'à saper nos fondements humains.

 

 

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