Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
10 juin 2013 1 10 /06 /juin /2013 08:36

 

Voici donc Jules Labesse en personne, le personnage central, le narrateur qui vous convie à venir faire un tour sur la Place du Marché; lieu géométrique de l'amitié, des rencontres, des illusions aussi, parfois des déboires, des deuils. Mais rien ne saurait entamer cette boule compacte, pas même les médisances, les jugements. Ici, une philosophie du quotidien, une philosophie immanente a posé son sac, dans lequel on puise sentences, aphorismes, comme un petit vade-mecum d'un existentialisme ordinaire, un genre de grimoire où l'on irait chercher quelque recette de magie. Et, pourtant, on le sait, les meilleurs guides pour la conscience sont à l'intérieur, bien cachés dans quelque pli, mais toujours prêtes à s'ouvrir, témoigner, donner des perspectives. La vie, son chemin semé de joies mais aussi d'embûches, comme un déconcertant Jeu de L'Oie, avec les dés qui, aussi bien, peuvent tomber sur la case Prison, aussi bien sur la Case 63. Mais après cette fameuse case, y a-t-il encore quelque chose à jouer ? 

 

Moi, c'est Jules Labesse.

 

 

   D'avoir écouté "Les Copains", ça m'a évidemment plongé dans mon adolescence, mes années de Lycée, le Régiment et je ne sais quoi encore, enfin le grand carrousel des "feuilles mortes" qui se ramassaient à la pelle et puis, surtout, ça m'a fait penser aux copains actuels, à tous ceux, sexagénaires et bientôt septua qui essaient, jour après jour, de transformer leur retraite en "Violon d'Ingres", de faire que la succession des semaines, des mois, des années, ne ressemble pas trop à un film usé des Frères Lumière où l'image tressaute sans cesse, où les personnages sont si flous qu'on les croirait irréels, en voie de perdition à la manière de quelque ancienne civilisation disparue dont l'humanité n'a même plus le souvenir.

  En tout, à se retrouver sur la Place du Marché, on est bien une bonne dizaine. Tous de bons copains, pour la plupart des anciens de la Manu. Tous les jours on se voit, même les jours fériés, même les jours de grève et même ceux où on est malades. C'est une règle sacro-sainte à laquelle nul ne penserait à déroger, c'est comme un serment de chevalerie, un vœu de fidélité entre les adeptes d'une Loge maçonnique, l'engagement d'assistance mutuelle des Membres de la Confrérie de Saint-Fiacre.

   Mais, à dire vrai, sur la quinzaine de badauds de la Place, il y a un noyau dur dont je fais partie, vous l'aurez compris, un véritable pépin compact, irrétrécissable, incompressible, "inoxydable" comme dirait Antoine et, comme les Trois Mousquetaires, "Tous pour un, un pour Tous", nous constituons une sorte de boule dense et homogène, un cercle parfaitement clos et chacun d'entre nous constitue un indispensable maillon de la chaîne et, au milieu de la chaîne, il y a un bien précieux qui s'appelle "l'Amitié".

Pourquoi sept, me direz-vous ? Eh bien parce que le hasard, parce que le destin. Oui, je vous vois un peu sceptique, je vous entends dire "l'explication est un peu courte, on aimerait bien quelques détails, quelques développements, c'est un peu lapidaire comme réponse, "le hasard, le destin", ce sont, comme qui dirait, des mots fourre-tout, on peut presque tout y mettre et avec ce genre de pirouette on évite les questions fâcheuses, on élude la complexité des rencontres, tous ces petits détails qui donnent à l'amitié, sa saveur, son goût, son inimitable contour"....

  Oui, je vous entends, vous n'êtes pas satisfaits. Moi non plus, du reste. Mais je vais y venir à nos petits destins en forme de rébus, de charades, de devinettes, à nos petits hasards semblables au Jeu de l'Oie avec ses cases départ, ses ponts à franchir, ses hôtelleries où attendre son tour, ses puits où l'on espère le renfort d'une main secourable, ses labyrinthes et alors on retourne en arrière, ses prisons, ses têtes de morts qui veulent dire qu'il faut recommencer à zéro, ses avancées et ses reculs, ses places laissées au plus chanceux que vous et puis les yeux toujours fixés sur la case 63, celle où il y a l'Oie, la grande, la victorieuse au cou tendu, aux pattes orange qui giclent dans tous les sens, qui cavale on ne peut mieux mais...

  Au fait, dites-moi, j'ai un peu oublié, l'Oie de la case 63 quand elle est arrivée tout au bout du Grand Jeu, à la case ultime, et après y en a plus d'autres de cases, elle a le droit de recommencer ? , un peu comme si on nous disait, "mais oui, vous pouvez encore jouer une fois, vous pouvez renaître VRAIMENT, vous pouvez repasser par la case départ, la case Ecole, puis Collège, puis Lycée, puis vous pouvez faire une pause à la case Ecole buissonnière, puis vous pouvez repartir, passer par la case Régiment, la case Mariage, la case Boulot, puis plein de cases avec plein d'allers-retours, avec plein de grosses tuiles et de petites joies, puis des grandes, la case Enfants, la case Vacances, la case Hôpital avec plein de petites misères sur vos parties les plus intimes, puis la case Cimetière pour des connaissances qui viennent de tirer leur révérence, puis la case Espoir, la case Maladie, la case Loisirs, la case Impôts avec des taxes à payer comme au Monopoly, la case Maison, la case Retraite, la case Petits-enfants". Mais, dites-moi, on y est déjà arrivés à cette foutue case 63, même on s'en était pas aperçu, ça passe si vite le Jeu de l'Oie, à vrai dire !

 

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

Présentation

  • : ÉCRITURE & Cie
  • : Littérature - Philosophie - Art - Photographie - Nouvelles - Essais
  • Contact

Rechercher