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22 août 2015 6 22 /08 /août /2015 08:00

 

 

L'enclin du jour.

 

 

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                                               Photographie : Blanc-Seing.                                                     

 

 

 

  La lumière est là, comme posée par effraction sur le bord des choses. Au début elle est tout sauf une évidence. Des mots à peine murmurés, une phrase qui se cherche, un texte à venir. Nous ne la voyons pas réellement. Nous la sentons plutôt, simple effleurement de l'épiderme, tremblement de feuille, douce fuite du nuage à contre-jour du ciel. Alors il nous faut demeurer dans cette forme d'ambiguïté, d'imprécision où le monde n'assure sa présence qu'à être vacant, à dissimuler ce dont le temps pourrait seulement l'assurer, d'une fuite, d'une perdition et alors rien ne serait plus vraiment visible.

  Mais s'inscrire dans cette probable perte est déjà une manière de finitude, de renoncement à percevoir ce qui s'annonce. La parole fructueuse est là qui se réserve, qui fait ses mille scintillements, ses infinités de boucles colorées, ses éclats dont, jamais, on ne peut se lasser. Être là, près de l'écoulement de l'eau et… attendre.

  Les arbres, dans leur élévation, sont les premiers à être touchés, à être fécondés. Ils se mettent à vibrer du-dedans de leur écorce alors que les racines sous le sombre des eaux sont des lianes  parcourues de signes rapides. Le mince peuple de la rivière est bientôt atteint de cette nécessité de se ressourcer, de s'abreuver aux meutes de gouttes claires, translucides comme les perles de cristal. La vie surgit, s'éploie, se fragmente, l'onde semble muette, simple traînée de cendre bleue sous le couvert des feuilles. Il y a si peu de réalité et l'on se croirait sur le cercle d'un rêve, la nuit alentour avec ses mailles étroites ourlées de silence.

  Pourtant cela coule et se répand jusqu'à la clairière de l'horizon humain. Mais c'est comme un mystère, une outre qui se viderait  de son contenu sans même percevoir la nature de ce qui s'y délivre et s'offrande afin que puisse se manifester l'exister dans toute sa plénitude. C'est ainsi, bien des événements ne tirent leur vanité qu'à la mesure de leur modestie, de leur cheminement presque inapparent.

  Nos yeux sont disponibles, nos mains recueillies en coupe, notre corps tendu dans une nécessité de voile afin que nulle chose émergeant au monde ne déserte sa propre aventure, n'abandonne sa signification, celle-ci fût-elle aussi mince que le ris de vent qui, toujours aborde la rivière, sans même que cette dernière en soit avertie. De cela il nous faut être conscient jusqu'en notre ardent sommeil dont les braises vives ne sont que la réverbération de la lumière habitant les choses de multiples façons. L'enclin du jour, malgré son souffle imperceptible, n'est présent qu'à être révélé dans cette venue du simple à lui-même. Il ne saurait guère y avoir d'autre alternative. Toute volonté de faire émerger les choses hors de leur consentement est, par avance, condamnée à être une simple palinodie, une ligne illisible parmi  les allées et venues des Egarés sur terre

 

 

 

                                                                                                     

 

   

 

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