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28 octobre 2020 3 28 /10 /octobre /2020 15:36

(Variations sur l’UTOPIE)

 

 

   « Mais, Maître, répliqué-je, comment les hommes pourraient-ils regarder autour d’eux, ils sont si occupés d’eux-mêmes, si dépendants de la proximité alors que les lointains ne leur paraissent qu’illusion, promesses fallacieuses, ‘plans sur la comète’ ? Ils tracent un cercle étroit autour d’eux et y accomplissent une danse dont ils pensent que c’est un geste essentiel, une sorte de chorégraphie divine qui les exonèrera de bien des malheurs ! »

   « Certes tu as raison, ils ne font que danser. Ils se considèrent, tout à la fois, comme le centre et la périphérie. Ils sont leur propre étoile et le satellite qui les regarde et magnifie leur existence. Ils sont pareils à ces aveugles de la Caverne qui, n’ayant jamais aperçu la clarté du jour en déduisent que ni le jour n’existe, ni le Soleil qui lui donne vie, ni le Souverain Bien, le Principe de Tout hors duquel rien n’existe que la fausseté, le faux-semblant, la duperie ! »

   « Mais cher Platon, tes idées sont si hautes, comment le commun pourrait-il s’en emparer sans les dénaturer, sans les faire plonger, aussitôt, dans le marigot des choses convenues, dans les pensées toutes faites qui sont plus rassurantes, elles ne nécessitent qu’une simple adhésion alors que tes théories demandent travail et abnégation, sans doute même, une certaine ascèse ? Le chemin qui conduit du domaine des simples images à l’Idée du Bien, en passant par la considération des choses et des êtres vivants, l’exactitude des objets mathématiques, la contemplation des souveraines Idées, ce chemin donc est si abrupt que la plupart des hommes, sauf les plus sages d’entre eux, préfèrent l’éviter. Je crois que l’ombre les rassure, la lumière les éblouit et les effraie d’une certaine façon. »

   Je dois avouer que je suis satisfait de ma courte péroraison. Pour la simple raison que, d’emblée, je me situe du côté de Platon, laissant mes congénères dans une nuit qui les définit, dont mon jugement me dispense de faire l’expérience. C’est du moins ce que doit penser mon illustre Interlocuteur. J’attends qu’il m’initie à de plus hauts concepts. Il n’est nullement avare en ce domaine. Cependant que nous devisons, nous nous sommes insensiblement rapprochés du Soleil au point de nous identifier à l’éclatante aura de l’Astre du Jour. Nous aurions même pu penser en être une émanation, un rayon dardé vers les ombres et les abîmes terrestres. Nous sommes arrivés dans les parages de l’Etoile sur une sorte de balcon aux balustres dorés qui ne peuvent qu’être d’or pur. Tout ruisselle de Beauté. Tout nait sous la coupe prodigue du Bien.  

 

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